Le Conseil de l'Europe sur le point de sanctionner la Russie
Le Conseil de l'Europe a annoncé jeudi soir qu'il "envisageait" de prendre dès vendredi des sanctions contre la Russie, après "l'agression armée" de l'Ukraine, comme il l'avait fait en 2014 après l'annexion de la Crimée.
Ces sanctions pourraient être annoncées à l'issue d'une nouvelle "réunion extraordinaire" des représentants permanents des 47 Etats membres -- dont la Russie et l'Ukraine -- de l'organisation paneuropéenne, qui ont déjà débattu à huis clos pendant de longues heures jeudi à Strasbourg.
Ceux-ci pourraient invoquer l'article 8 des statuts du Conseil, qui permet de suspendre l'ensemble des droits de "représentation" d'un Etat membre lorsqu'il "enfreint gravement" le droit, voire, dans une étape ultérieure, de l'exclure purement et simplement de l'institution.
Selon le site du quotidien Daily Mail, le député conservateur John Howell, chef de la délégation britannique à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE), s'est d'ores et déjà prononcé aux Communes (chambre basse du Parlement britannique) en faveur d'une "suspension de la Russie".
"Je soutiens sans réserve ce qu'il vient de dire", a enchaîné le Premier ministre Boris Johnson, toujours selon ce site.
En attendant, les membres du Conseil ont "condamné" dès jeudi soir "avec la plus grande fermeté" l'agression russe, "violation" du droit international, invitant "instamment" Moscou à "cesser immédiatement et sans condition ses opérations militaires en Ukraine".
Le Conseil de l'Europe replonge ainsi dans la tourmente qui l'avait fait vaciller en 2014 après l'annexion de la Crimée, mais au coeur cette fois d'une crise à l'intensité décuplée.
A l'époque, la délégation russe au sein de l'APCE s'était vue privée de son droit de vote. Une mesure essentiellement symbolique à laquelle la Russie avait répliqué par le boycott des sessions de cette assemblée et la suspension du versement de son écot au budget du Conseil, qui menaçait déjà la pérennité de l'institution.
Après cinq années de vives tensions, le différend avait été réglé et la délégation russe avait réintégré comme un seul homme l'APCE, au grand dam des parlementaires ukrainiens.
- "Conséquences dévastatrices" -
Le chef de l'Etat français Emmanuel Macron, parmi d'autres, avait oeuvré à ce règlement, alors que la France assurait la présidence semestrielle tournante du Conseil, multipliant les gestes d'apaisement envers son homologue russe Vladimir Poutine, reçu chaleureusement au Fort de Brégançon, la résidence d'été des présidents français.
Cette fois, l'enjeu est double. Créé en 1949 et resté dans l'ombre de l'Union européenne, le Conseil de l'Europe n'en demeure pas moins l'un des rares forums diplomatiques du continent où Russes et Ukrainiens peuvent s'affronter autour du tapis vert. Ce forum est donc menacé.
Mais cette crise représente surtout une menace pour les citoyens russes pour lesquels la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH), bras judiciaire du Conseil de l'Europe, est le dernier recours face à l'arbitraire de leurs juridictions nationales.
Si la Russie devait quitter le Conseil, ils seraient privés de ce recours.
Quoi qu'il en soit et sans attendre la décision du Comité des ministres, Marija Pejcinovic Buric, secrétaire générale du Conseil, a condamné elle aussi "fermement" jeudi l'invasion de l'Ukraine qui pourrait avoir des "conséquences dévastatrices pour l'ensemble du continent".
Dans la même veine, Tiny Kox, le président néerlandais de l'APCE s'est dit "profondément consterné par l'attaque militaire de la Fédération de Russie contre l'Ukraine".
Quant à la commissaire aux Droits de l'Homme de l’institution, Dunja Mijatović, elle a appelé ses Etats membres "à accueillir à bras ouverts les personnes qui fuient l'Ukraine".
M.Schneider--HHA