Après une tournée "dramatique", le patron du rugby français promet la "tolérance zéro"
Les actes répréhensibles commis par des joueurs du XV de France se heurteront désormais à une politique de "tolérance zéro", a promis mardi le président de la Fédération française de rugby après une tournée "dramatique" en Amérique du Sud, marquée par l'inculpation de deux joueurs en Argentine pour viol aggravé et la vidéo raciste d'un troisième.
Selon Florian Grill, le procès d'Hugo Auradou, 20 ans, et Oscar Jegou, 21 ans, devrait se tenir d'ici "neuf à quatorze mois". Ils sont détenus à Mendoza (ouest), où une femme les accuse de l'avoir violée à plusieurs reprises et battue dans une chambre d'hôtel, la nuit du 6 au 7 juillet, après le premier match de l'équipe de France en Argentine. Eux invoquent une relation consentie, selon leur avocat argentin.
S'il a appelé au respect de la présomption d'innocence et si la fédération a mis la main à la poche et aidé à trouver une maison afin d'appuyer leur demande de placement en résidence surveillée, le patron du rugby français a relevé que les deux hommes n'avaient pas respecté le cadre "extrêmement précis" régissant les tournées à l'étranger du XV de France.
Avant ces accusations portées contre deux joueurs qui venaient de connaître leur première sélection, le XV de France avait eu à affronter une première tempête en Argentine après la publication par Melvyn Jaminet sur les réseaux sociaux d'une vidéo raciste. Immédiatement renvoyé en France, l'arrière de Toulon est désormais visé par une enquête judiciaire pour "menace de mort en raison de l'origine".
- Troisièmes mi-temps -
Il y aura "un avant et un après" cette tournée, a promis Florian Grill. Pour tout écart, il compte "renforcer les sanctions, qui seront désormais financières mais qui pourront aller jusqu'à l'exclusion temporaire ou définitive des équipes de France".
Sa conférence de presse à Marcoussis (Essonne) se tenait au lendemain du retour des Bleus en France et quelques heures après que les familles de Jegou et Auradou ont été reçues par des représentants du parquet argentin à Mendoza.
Florian Grill a en revanche exonéré de toute responsabilité l'encadrement de l'équipe de France. Tout comme il a défendu "les valeurs du rugby".
La semaine dernière, dans Libération, le sociologue du sport Seghir Lazri jugeait le rugby "miné par les représentations stéréotypées sur les femmes et par une domination masculine et raciale". D'autres ont dénoncé un phénomène de "meute" propre aux troisièmes mi-temps, sur fond d'alcool, voire de cocaïne.
"Je ne crois pas que l'esprit de la troisième mi-temps doive être remis en cause", a répondu Florian Grill. "On doit être capables à la fois d'avoir un minimum de soupapes nécessaires" et en même temps, "d'accepter un principe de responsabilité et de sanctions." Il a toutefois dit la détermination de son organisation à lutter contre les phénomènes d'addiction, évoquant en particulier la consommation d'alcool et de cocaïne.
- Chronique judiciaire -
"Malgré le côté très sensible et dommageable de ces deux affaires", l'économiste du sport Christophe Lepetit appelle à ne pas "surréagir" quant à leur impact sur l'équilibre, y compris économique, du rugby français. "D'autant plus que la réaction des instances (FFR et club de Toulon, NDLR) a été rapide et assez bonne. Elle paraît de nature à rassurer les sponsors, et l'écosystème plus global du rugby à court terme", estime le chercheur au Centre de droit et d'économie du sport de Limoges (CDES).
Ces accusations de viol aggravé et cette vidéo raciste ne sont pas les premiers épisodes de la chronique judiciaire écrite par les rugbymen français.
Au cours de la seule saison écoulée, le rugby français a été éclaboussé par les condamnations de Mohamed Haouas et Wilfried Hounkpatin pour violences conjugales et de Bastien Chalureau pour l'agression de deux anciens joueurs de rugby. Invoqué par les parties civiles, le caractère raciste de cette agression avait toutefois été écartée par la cour d'appel de Toulouse.
U.Smith--HHA