Seize ans après une IRM litigieuse, la mort d'une trentenaire "en parfaite santé" en procès
Un procès comme un "tremplin" vers la vérité: après 16 ans de combat, Bernard Elhaik et sa famille ont obtenu un procès contre l'AP-HP et un neurologue pour une IRM mal interprétée et des "mensonges" qui ont, selon eux, abouti à la mort de sa fille, Carole Darmon.
Ce vendredi 14 mars 2008, cette mère de famille de 36 ans, "en parfaite santé", se plaint d'une atroce migraine.
A l'hôpital Bichat, à Paris, de premiers examens écartent une pathologie grave.
Un neurologue, Tarik S., signe son bon de sortie le samedi après une IRM qu'il juge normale.
Le lundi matin, le médecin la rappelle pour un examen complémentaire. Carole Darmon retourne à l'hôpital et fait dans l'après-midi un accident vasculaire cérébral "massif".
En état végétatif, elle décède le 6 novembre 2016.
Le dossier médical montrera, d'après l'enquête, que des signes "discrets mais indiscutables" d'hémorragie dans le cerveau apparaissaient sur l'IRM qui a donc fait l'objet d'"une erreur d'interprétation" manifeste.
Le 29 novembre, une juge d'instruction parisienne a ordonné un procès pour l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et Tarik S. pour blessures involontaires avec incapacité totale de travail de plus de trois mois. Deux ans d'emprisonnement sont encourus.
Sollicité par l'AFP, l'avocat de l'AP-HP, Me Benoît Chabert, n'a pas commenté.
L'avocat de Tarik S., Me Bernard Grelon, se dit lui "profondément surpris" par ce procès mais "convaincu de pouvoir démontrer l’absence d'infraction" du médecin.
Dans son ordonnance dont l'AFP a eu connaissance, la magistrate instructrice souligne "la longueur et la complexité de cette procédure judiciaire" qui "ont rajouté aux épreuves subies par cette famille".
Sur le fond, la juge identifie deux fautes: d'une part, "la sortie du samedi sans lecture de l'examen par un radiologue et sans rédaction d'un compte-rendu écrit". D'autre part, "le temps de latence", "plusieurs heures", "pour la prise en charge de Carole Darmon le lundi".
Avocat de la famille, Me Romain Boulet parle d'une "procédure effarante", dans laquelle il a même eu "recours à un détective privé." "Jamais, poursuit-il, je ne me suis heurté à une telle résistance de l’institution."
Bernard Elhaik a lui qualifié auprès de l'AFP ce procès de "très grande victoire" mais il a dit espérer, à travers d'autres procédures, aller "chercher les vrais responsables", notamment une radiologue qui d'après lui a lu l'IRM le samedi mais n'a pas fait de compte-rendu. L'enquête ne l'a pas mise en cause.
X.Nguyen--HHA