Corse: Charles Pieri écroué, sept autres personnes mises en examen
Coup de filet judiciaire dans les milieux nationalistes corses: Charles Pieri, figure suspectée d'avoir dirigé un temps le FLNC, a été mis en examen à Paris et écroué vendredi pour des infractions terroristes, tandis que sept autres personnes ont été mises en examen.
Le militant du parti indépendantiste Corsica Libera, 72 ans, figure controversée du nationalisme corse, déjà condamné à plusieurs reprises, y compris pour des infractions terroristes, avait été interpellé lundi en Corse avec six autres militants de son parti et une huitième personne dans cette information judiciaire portant sur la menace du retour à la lutte armée du FLNC (Front de libération nationale corse).
Ces huit personnes dont Charles Pieri ont également été mises en examen pour acquisition et détention non autorisées d’armes de catégorie B en relation avec une entreprise terroriste, ainsi que pour refus de communication ou de mise en œuvre d’une clé de chiffrement, d'après une source judiciaire.
Charles Pieri a été placé en détention provisoire. Les sept autres personnes ont été relâchées vendredi sous contrôle judiciaire, ont indiqué des avocats et la source judiciaire.
L'avocat de Charles Pieri, Me Marc Antoine Luca, a indiqué à l'AFP que "l'ensemble des personnes mises en examen, qui ne nient pas être des militants politiques et par définition publics, contestent en revanche totalement les faits et tous liens en relation avec une entreprise terroriste, qui leurs sont reprochés."
Me Marc Antoine Luca défend aussi Matteo Giona, Lionel Giona, Jacques Mosconi, Nicolas Mattei ainsi que Ghjuvan'Battista Pieri, le fils de Charles Pieri, qui font partie des mis en cause.
Enfin, Me Emmanuel Mercinier-Pantalacci, avocat de Ghjiseppu Maria Verdi, petit-fils de Charles Pieri, dénonce lui "une mise en examen grotesque. Elle ne repose sur rien. Il s'agit manifestement de légitimer quatre jours de garde à vue abusive."
Ex-parti phare de la mouvance indépendantiste, Corsica Libera n'a plus qu'une seule élue depuis les élections territoriales de 2021, contre 13 auparavant.
Me Emmanuel Molina, conseil d'Alexandre Michel, huitième interpellé qui n’est pas membre de Corsica Libera, a lui indiqué qu'il y avait "lieu de se réjouir d'une remise en liberté qui ne saurait cependant occulter le fait que (son) client conteste à juste titre vigoureusement avoir commis quelque infraction que ce soit."
- "Expression politique muselée" -
Dans un communiqué, transmis le 2 septembre 2021 à Corse-Matin, le FLNC avait menacé d'un retour à la lutte armée sur l'île si l'Etat français poursuivait "sa politique de mépris".
Sur une vidéo accompagnant le texte, une cinquantaine d'hommes encagoulés, vêtus de noir et lourdement armés, entouraient un activiste qui lisait le texte signé du FLNC-Union des combattants (FLNC-UC) et du FLNC du 22 octobre.
Le 1er décembre, trois personnes avaient déjà été arrêtées.
Deux d'entre elles, dont Pierre Paoli, militant de Corsica Libera, avaient été relâchées trois jours plus tard, tandis que le troisième homme a été transféré sur mandat d'amener à Paris, où il a été mis en examen et placé en détention provisoire mercredi, selon la source judiciaire.
Selon Corse-Matin, il s'agit de Richard Bouza-Fernandez.
A France 3 Corse Viastella, l'avocate Me Laura Maria Poli, qui défend cet homme avec Amale Kenbib, a indiqué que "cette mise en examen (était) une surprise", pour une personne "totalement inconnue des services de police et de gendarmerie"
Elle a évoqué une "incarcération pression". Elle n'a pas répondu à l'AFP.
Au total, ce sont donc neuf personnes qui ont été mises en examen cette semaine au pôle antiterroriste, dont deux qui ont été incarcérées, parmi lesquelles Charles Pieri.
Sulidarita, association de défense des prisonniers dits "politiques", a dénoncé vendredi auprès de l'AFP des "dossiers totalement vides".
"Par ces méthodes, l’Etat français cherche à museler une expression politique et à mettre la pression sur des militants et leurs familles en exploitant toutes les possibilités offertes par ses législations d'exception", a-t-elle estimé.
La Corse connaît depuis un an une multiplication d'incendies criminels visant principalement des résidences secondaires de Français résidant dans l'Hexagone, mais sans revendication officielle.
Gérald Darmanin a reporté à janvier le déplacement qu'il devait effectuer cette semaine en Corse, estimant en accord avec les élus locaux que le climat n'était "pas favorable", avait indiqué dimanche le ministère de l'Intérieur.
H.Beehncken--HHA