Brésil: la police reprend le contrôle des lieux de pouvoir envahis à Brasilia
La police a évacué le Congrès brésilien, la Cour suprême et le palais présidentiel à Brasilia, plus de quatre heures après l'assaut donné dimanche par des centaines de partisans de l'ex-président d'extrême droite Jair Bolsonaro, rappelant l’invasion du Capitole à Washington en janvier 2021.
La situation semblait maîtrisée, même si un grand nombre de ces manifestants refusant de reconnaître l'élection de Lula demeuraient dans les alentours des lieux de pouvoir de la capitale brésilienne.
Il a placé les forces de l'ordre locales sous le commandement des forces fédérales pour reprendre en main la sécurité à Brasilia où les policiers ont été totalement débordés par les assauts des bolsonaristes.
"Nous allons tous les retrouver et ils seront tous punis", a-t-il dit depuis Araraquara, dans l'Etat de Sao Paulo, où il s'était rendu après des inondations, déplorant des incidents "sans précédent dans l'histoire du Brésil". "Ceux qui ont financé (ces manifestations) vont payer pour ces actes irresponsables et antidémocratiques", a-t-il prévenu.
- "Inacceptable" -
Selon plusieurs médias brésiliens, au moins 150 bolsonaristes, vêtus en jaune et vert, ont été arrêtés. Des images télévisées les montraient descendant en file indienne, les mains derrière le dos, la rampe du palais présidentiel de Planalto, encadrés de policiers. Sur d'autres images, on peut voir un bus rempli de manifestants interpellés partir en direction d'un poste de police.
Les forces de l'ordre semblaient reprendre progressivement le contrôle de la situation en début de soirée, des canons à eau maintenant les manifestants à distance.
Le gouverneur du district fédéral de Brasilia, Ibaneis Rocha, allié de Jair Bolsonaro qui a quitté le Brésil deux jours avant la fin de son mandat et se trouve en Floride, aux Etats-Unis, a présenté ses excuses au président Lula dans une vidéo. Il a qualifié les responsables des déprédations des bâtiments publics de "vrais vandales" et de "vrais terroristes".
"On surveillait avec le ministre (de la Justice) Flavio Dino tous ces mouvements (...) A aucun moment on a pensé que ces manifestations prendraient de telles proportions", a-t-il affirmé.
D'autres alliés du président sortant se sont également désolidarisés de ces violences, dont Valdemar Costa Neto, président du PL, le parti de Bolsonaro, qui a regretté "un jour triste pour la nation brésilienne"
Ces saccages ont provoqué une avalanche de réactions outrées dans le monde. Le président français Emmanuel Macron a dit à Lula qu'il pouvait "compter sur le soutien indéfectible de la France".
Son homologue américain Joe Biden a jugé "scandaleuses" les violences des manifestants. "Utiliser la violence pour attaquer les institutions démocratiques est toujours inacceptable", a tweeté son secrétaire d'Etat Antony Blinken.
- Dégâts considérables -
Le centre du pouvoir à Brasilia a été plongé dans le chaos. La zone avait été pourtant bouclée par les autorités mais les bolsonaristes sont parvenus à rompre les cordons de sécurité.
Les policiers ont tenté, en vain, de les repousser avec du gaz lacrymogène. Un agent de la police montée a été désarçonné puis frappé à terre par des assaillants armés de bâtons.
Un syndicat de presse local a fait état de l'agression de cinq journalistes. Parmi eux, un photographe de l'AFP a été frappé et s'est fait voler tout son matériel.
Sur les réseaux sociaux, ont circulé des vidéos montrant des bureaux de parlementaires saccagés.
Un manifestant s'est assis sur le siège du président du Sénat, un mimétisme saisissant avec les manifestants pro-Trump au Congrès américain il y a deux ans.
Les dégâts sont considérables, dans ces bâtiments qui sont des trésors de l'architecture moderne et regorgent d'oeuvres d'art.
Des tableaux d'une valeur inestimable ont été endommagés, dont "Les mulâtres", du peintre moderniste Di Cavalcanti, exposé au Palais présidentiel et percé de plusieurs trous, selon des photos circulant sur les réseaux sociaux.
Selon la chaîne CNN, des manifestants ont mis le feu au tapis d'un salon du Congrès, qui a dû être inondé pour éteindre l'incendie.
"Il faut qu'on rétablisse l'ordre, après cette élection frauduleuse", a dit à un journaliste de l'AFP Sarah Lima, ingénieure pro-Bolsonaro de 27 ans venue de Goianesia, à 300 km de Brasilia.
Des bolsonaristes manifestaient déjà devant des casernes militaires depuis la défaite de peu du président sortant d’extrême droite le 30 octobre.
Ils réclamaient l’intervention de l’armée pour empêcher Lula de revenir au pouvoir pour un troisième mandat, après ceux de 2003 à 2010. Certains d'entre eux ont également bloqué des axes routiers pendant plus d'une semaine après l'élection.
Th.Frei--HHA