Soutien massif et allègement de la dette, la recette de l'ONU pour reconstruire le Pakistan
Le chef de l'ONU a demandé lundi un soutien massif pour lever les plus de 8 milliards de dollars dont le Pakistan a besoin pour se reconstruire après les inondations dévastatrices de l'an dernier, qui pourraient bien préfigurer le sort qui attend un grand nombre de pays face au changement climatique.
"Aucun pays ne mérite de subir ce qui est arrivé au Pakistan", a déclaré Antonio Guterres, à l'ouverture d'une conférence internationale devant mobiliser la moitié des 16,3 milliards de dollars ((15,3 milliards d'euros) jugés nécessaires pour reconstruire le pays afin, en particulier, qu'il résiste mieux aux conséquences du changement climatique.
Le secrétaire général de l'ONU a réclamé "des investissements massifs" et une réforme du système financier international pour aider le Pakistan, un sujet qu'il avait déjà évoqué lors de la COP27 sur le climat en Egypte.
Présente lundi, la Banque mondiale a invité à "maintenir les dépenses dans des limites supportables".
"Une reprise véritablement résiliente ne sera pas possible sans réformes budgétaires et structurelles supplémentaires", a prévenu déclaré Martin Raiser, vice-président de la région Asie du Sud à la Banque mondiale, en appelant à mieux cibler l'aide sociale, à réduire les dépenses qui "affaiblissent les finances publiques" et à adopter une "fiscalité plus progressive et plus large".
Les inondations dévastatrices - ayant fait plus de 1.700 morts et touchées plus de 33 millions d'autres - et la crise énergétique mondiale ont accentué la pression sur l'économie pakistanaise, plongeant le pays dans une situation financière extrêmement difficile.
Le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif a déclaré lors de la conférence que son pays était engagé dans une "course contre la montre" pour faire face à des besoins immenses. "Nous sommes à un tournant de l'histoire", a-t-il averti.
Devant les journalistes, il a enjoint le Fonds monétaire international (FMI) à réduire la pression. "J'essaie constamment de les persuader de nous accorder une pause", a-t-il dit. "La stabilité économique est très importante. Le jour où nous serons tous morts, la stabilité économique sera parfaite", a ironisé à ses côtés le chef de l'ONU, en guise de soutien.
- Financements internationaux "créatifs" -
Le Pakistan, le cinquième pays le plus peuplé au monde avec 216 millions d'habitants, est responsable de moins d'un pour cent des émissions de gaz à effet de serre. Mais il est l'un des plus vulnérables face aux événements météorologiques extrêmes qui se multiplient.
Le pays fait d'ailleurs partie de ceux qui ont soutenu à la COP27 la création du fonds "pertes et dommages" visant à soutenir les pays du sud face aux conséquences du réchauffement climatique.
"En cas de doute sur les pertes et les dommages, allez au Pakistan", a glissé M. Guterres lundi, assurant que le pays est "doublement victime du chaos climatique et d'un système financier mondial en faillite morale".
Il a déploré que le système financier international ne vienne pas suffisamment en aide aux pays à revenu intermédiaire qui ont besoin d'"investir dans la résilience face aux catastrophes naturelles", en allégeant la dette ou en leur offrant de nouveaux financements, et a réclamé des financements internationaux "créatifs" pour aider ces pays "lorsqu'ils en ont le plus besoin".
Sur les 16,3 milliards de dollars nécessaires pour financer le "Plan de redressement, de réhabilitation et de reconstruction résilients" du Pakistan, le gouvernement estime pouvoir en financer la moitié par le biais de son propre budget et de partenariats public-privé, mais a besoin de la communauté internationale pour payer le reste.
Islamabad et l'ONU ont expliqué que la conférence de lundi, à laquelle participent des représentants d'une quarantaine de pays, de la Banque mondiale et de banques de développement, se veut beaucoup plus large qu'une traditionnelle conférence de donateurs, car elle cherche à mettre en place un partenariat international à long terme axé sur la reconstruction, mais visant aussi à améliorer la résilience climatique du Pakistan.
Le Groupe de la Banque islamique de développement s'est engagé à financer 4,2 milliards de dollars au cours des 3 prochaines année.
Et quelques pays ont fait des annonces lundi, dont les Etats-Unis avec 100 millions de dollars supplémentaires et la France avec 360 millions d'euros de projets pour aider à la reconstruction et 10 millions supplémentaires pour l'aide d'urgence, mais le montant final devrait être connu en fin de journée.
R.Hansen--HHA