Berlin fait une avancée sur la livraison de Leopard, scandale de corruption à Kiev
l'Allemagne a entrouvert mardi la voie à une autorisation pour les alliés de livrer des chars lourds Leopard réclamés avec insistance par l'Ukraine, où le gouvernement est secoué par le premier grand scandale de corruption depuis le début de l'invasion russe il y a près d'un an.
Quatre vice-ministres, dont celui de la Défense Viatcheslav Chapovalov, ainsi que cinq gouverneurs ont dû quitter leur poste dans la foulée de cette affaire, ont annoncé les autorités ukrainiennes.
Pendant ce temps, à Berlin, le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius a dit avoir "expressément encouragé les pays partenaires qui ont des chars Leopard prêts à être déployés à entraîner les forces ukrainiennes sur ces chars", au cours d'une conférence de presse avec Jens Stoltenberg, le chef de l'Otan.
Ces déclarations marquent une avancée dans la position de l'Allemagne, où le gouvernement d'Olaf Scholz subit depuis plusieurs jours une pression croissante en vue de donner son aval aux Etats membres de l'Otan qui le souhaitent de livrer à l'Ukraine des Leopard, de fabrication allemande.
Le chef de l'Otan a de son côté salué le "message clair" du nouveau ministre allemand de la Défense, en poste depuis moins d'une semaine.
Réaffirmant l'importance de fournir davantage d'armes lourdes à Kiev, il s'est déclaré "confiant" dans le fait qu'une solution sera "bientôt" trouvée sur la livraison de ces chars d'assaut.
"De telles livraisons n'apporteront rien de bon" aux relations russo-allemandes, a aussitôt réagi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, jugeant que cela "laisserait une trace indélébile".
- Demande officielle de Varsovie
La Finlande et la Pologne se sont déclarées prêtes à fournir l'Ukraine ces chars susceptibles d'avoir un impact significatif pour les Ukrainiens face au rouleau compresseur des troupes russes qui reprennent un peu de terrain sur le front de l'est de l'Ukraine.
Le ministre polonais de la Défense Mariusz Blaszczak a annoncé avoir officiellement demandé son accord à l'Allemagne, l'invitant au passage à se joindre à "la coalition de pays soutenant l'Ukraine avec des chars Leopard 2".
Lundi, la Pologne avait prévenu qu'elle était prête à se passer de l'autorisation de Berlin. Ce pays, qui se dit prêt à envoyer 14 Leopard à Kiev, discute avec une quinzaine d'Etats à ce sujet, de nombreuses armées européennes possédant de tels blindés.
Le chancelier social-démocrate Olaf Scholz a jusqu'à présent refusé de se prononcer sur la question de ces livraisons indirectes, tout comme sur celle de fournir directement des Leopard issus des stocks allemands.
La crainte d'une escalade militaire avec Moscou et ses réticences à faire assumer à son pays un leadership dans le camp occidental expliquent ses hésitations, selon des analystes.
La question suscite des tensions au sein même de sa coalition gouvernementale avec les écologistes et les libéraux. Sa ministre des Affaires étrangères Annalena Baerbock (Verts) a assuré dimanche que l'Allemagne était disposée à autoriser Varsovie à fournir ces blindés à l'Ukraine.
Seul le chancelier peut prendre une décision sur cette question, a toutefois rappelé M. Pistorius. "Je comprends les inquiétudes et les craintes des amis ukrainiens. L’Allemagne a une responsabilité et un rôle particulier", a-t-il admis dans un entretien avec la télévision publique.
Mais "nous devons réfléchir soigneusement à ce que nous pouvons faire", a-t-il estimé, répétant que Berlin ne souhaitait pas faire "cavalier seul".
Dans ce contexte, l'Union européenne a annoncé lundi qu'elle accordait 500 millions d'euros supplémentaires pour fournir des armements à Kiev et allouait 45 millions d'euros à la formation des militaires ukrainiens sur le territoire de l'UE.
Et signe des tensions croissantes avec Moscou : deux des trois pays baltes, l'Estonie et la Lettonie, avaient chacun annoncé leur décision d'expulser l'ambassadeur de Russie sur leur sol, emboîtant le pas à la Lituanie qui avait fait de même l'année dernière.
- L'Ukraine rattrapée par la corruption
Pour l'Ukraine, le soutien des alliés occidentaux, militaire et financier, est crucial et elle dit avoir besoin de centaines de chars modernes et d'autres armements pour une nouvelle offensive.
"Aujourd'hui, cela fait exactement 11 mois depuis le début de la guerre à grande échelle. Le 335e jour. Un jour que nous passerons comme le 334e, unissant nos forces pour la victoire", a déclaré le président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Ce jour est aussi marqué par le retour en force d'un mal endémique dans ce pays : la corruption.
Outre le vice-ministre de la Défense, celui de la Politique sociale et deux autres du Développement territorial ont été démis de leurs fonctions après un scandale de corruption présumé concernant des approvisionnements de l'armée, le premier de cette ampleur depuis le 24 février 2022.
D'autres limogeages avaient déjà récemment eu lieu en Ukraine, qui était classée à la 122e place sur 180 sur l'indice de perception de la corruption de l'ONG Transparency International en 2021.
Dimanche, le ministre adjoint des Infrastructures Vassyl Lozinsky avait été arrêté, accusé d'avoir reçu un pot-de-vin de 400.000 dollars pour "faciliter" l'achat de générateurs à des prix gonflés, au moment où son pays est confronté à de vastes coupures d'électricité à la suite des frappes russes sur les installations énergétiques.
Pavlo Galimon, le chef adjoint du parti présidentiel "Serviteur du peuple", a quant à lui été limogé lundi, sur fond d'accusations de corruption en liaison avec l'achat d'une propriété à Kiev.
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F.Schneider--HHA