Retraites: les syndicats revendiquent une mobilisation en hausse
"Je ne veux pas travailler plus longtemps" : de Belfort à Bayonne, les opposants à la réforme des retraites ont commencé mardi à défiler dans des cortèges bien garnis, les syndicats tablant sur davantage de manifestants que le 19 janvier, pour tenter de faire reculer le gouvernement.
Partout en France, les premiers cortèges se sont ébranlés à partir de 10H00 avec ce même refus de la réforme-phare d'Emmanuel Macron et son report de l'âge légal de départ à 64 ans.
"C'est une des plus grandes manifestations organisées dans notre pays depuis des dizaines d'années", a déclaré Laurent Berger, le numéro un de la CFDT, notant, peu avant le départ du cortège parisien, qu'il y a "plus de monde" dans la rue que le 19 janvier, lors de la première mobilisation.
Entre un et deux millions de manifestants selon les sources, avaient alors battu le pavé.
"Dans tous les retours que j'ai, c'est plus que le 19", a renchéri son homologue de la CGT Philippe Martinez, tandis que Frédéric Souillot (FO) a mis en avant un "tir de barrage".
"Je ne veux pas travailler plus longtemps, je fais un métier pénible et je serai déjà cassée à 62 ans. Ce n'est pas envisageable, physiquement et moralement", explique Sylvie Dieppois, 56 ans, aide de cuisine dans une mairie de la banlieue rouennaise, qui défilait à Rouen.
La police attend 1,2 million de manifestants en fourchette haute, dont 100.000 à Paris.
Les premiers chiffres, selon la police, étaient dans les mêmes ordres de grandeur que ceux du 19 avec, par exemple, 14.000 personnes à Rouen (contre 13.000 le 19), 12.000 au Havre (contre 11.000) ou 28.000 à Nantes (contre 25.000). Une nouvelle fois, les villes moyennes semblaient en pointe avec 7.000 manifestants à Alès (Gard, 35.000 habitants) ou 8.500 à Angoulême (9.000 le 19).
A la Réunion, plus de 10.000 personnes selon les organisateurs, 7.300 selon la préfecture, ont manifesté dans les deux principales villes de l'île.
- Un quart des profs en grève -
Au total, onze mille policiers et gendarmes sont mobilisés, dont 4.000 à Paris.
Une intersyndicale doit se réunir à partir de 18H00 au siège de FO pour décider des suites du mouvement, et probablement annoncer au moins une nouvelle journée de mobilisation.
La grève est très suivie dans les transports avec une circulation des métros et RER "très perturbée" en région parisienne. Il y avait 36,5% de grévistes à la SNCF, contre 46,3% le 19 janvier de source syndicale.
Dans l'Education nationale, le ministère comptabilisait à la mi-journée un quart de professeurs grévistes dans le primaire (maternelle et élémentaire) et le secondaire (collège et lycée), en recul par rapport au 19. Le Snes-FSU, premier syndicat du secondaire, chiffre à 55% le nombre de professeurs des collèges et des lycées en grève.
La CGT a annoncé 75 à 100% de grévistes dans les raffineries et dépôts de TotalEnergies. Quant aux grévistes d'EDF, ils ont occasionné dans la nuit des baisses de charges dans les centrales électriques de "près de 3.000 MWH", sans toutefois causer de coupures, selon la CGT et EDF.
La mobilisation concerne des secteurs professionnels variés. A Nîmes, les entrées de la maison d'arrêt ont été bloquées et l'extraction de détenus rendue impossible, selon une source syndicale.
Des mairies, comme celle de Paris ou Montreuil (Seine-Saint-Denis), devaient garder portes closes.
- "Certain de perdre" -
Pris en étau entre la détermination de la rue et la virulence des oppositions à l'Assemblée, où le projet est débattu depuis lundi en commission, le gouvernement a durci le ton depuis ce week-end, au risque d'être accusé par la gauche, à l'instar de Fabien Roussel (PCF), "de fracturer durement" le pays.
Elisabeth Borne, qui se rendra devant sa majorité en début d'après-midi, a ainsi affirmé dimanche que le recul de l'âge n'était "plus négociable", même si des mesures en faveur des femmes, plus impactées par la réforme que les hommes, sont envisagées.
En retrait sur ce dossier, Emmanuel Macron, qui joue en partie son quinquennat sur cette réforme, l'a jugée lundi "indispensable".
Mais pour l'exécutif, la bataille de l'opinion "est très mal engagée", selon Frédéric Dabi, de l'institut de sondages Ifop : "Au fur et à mesure que les Français entrent dans la connaissance de la réforme, l'adhésion recule" dans les sondages.
"Monsieur Macron est certain de perdre", a assuré Jean-Luc Mélenchon (LFI) à Marseille, estimant que la France était "en train de vivre une journée historique".
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J.Fuchs--HHA