Elections locales et référendum sur l'extradition en Equateur
Quelque 13,4 millions d'Équatoriens sont appelés aux urnes ce dimanche pour des élections locales et pour un référendum clé qui décidera, entre autres, si le pays accepte l'extradition des narcotrafiquants vers les Etats-Unis.
Les électeurs votent pour désigner leurs maires, les conseillers municipaux, et les préfets de province (gouverneurs) qui prendront leurs fonctions en mai pour un mandat de quatre ans.
Les enjeux sont surtout locaux, mais constitueront inévitablement un test pour le président Guillermo Lasso (droite), au pouvoir depuis 2021, et dont l'impopularité atteint des records (80% selon un dernier sondage).
Le vote a débuté à 07H00 locales (12H00 GMT) pour se clôturer à 17H00. Il se déroule dans un contexte préoccupant de violences criminelles croissantes dans le pays, liées au narcotrafic.
Samedi, un candidat à la mairie d'une ville côtière a été assassiné. Omar Menéndez, 41 ans, était candidat à Puerto Lopez (sud-ouest) pour le mouvement d'opposition "Révolution citoyenne" qui soutient l'ancien président socialiste Rafael Correa (2007-2017).
Il y a quinze jours, un autre candidat aux municipales avait été assassiné dans une autre ville côtière, à Salinas (sud-ouest).
Le Conseil national électoral (CNE) a "condamné fermement" ce nouveau meurtre, assurant avoir pris les mesures pour "garantir l'ordre et la sécurité du processus électoral de manière permanente".
Fin janvier, le gouvernement avait mis en garde contre une trentaine de candidats, possiblement liés aux trafic de drogue ainsi que d'autres activités illégales comme l'exploitation minière.
- "Affaiblir" les bandes criminelles -
En parallèle à ce scrutin, les électeurs doivent se prononcer sur huit questions, dans le cadre d'un référendum convoqué en novembre par le président Lasso, sur divers thèmes de sécurité, de politique et d'environnement.
Au centre du débat, l'extradition des Equatoriens, interdite depuis huit décennies.
Dans le cadre de sa lutte contre le trafic de drogues, le président Lasso défend la remise d'Equatoriens à d'autres pays s'ils commettent des délits liés à la criminalité transnationale organisée.
L'objectif est évidemment l'extradition vers les Etats-Unis pour les narcotrafiquants, avec le risque pour eux d'y croupir en prison de longues années, dans des conditions dures et sans possibilité d'y corrompre leurs gardiens.
L'arme avait été utilisée avec succès en Colombie voisine à partir des années 90, agissant comme particulièrement dissuasive contre les maitres d'oeuvre du trafic dans ce pays, premier producteur au monde de cocaïne.
L'Equateur a vu monter en flèche ces dernières années la violence et la criminalité liées au trafic, en même temps que les saisies de drogue. Le taux d'homicide a presque doublé entre 2021 et 2022.
Le chef de l'Etat veut "affaiblir et démanteler les plus de 25 bandes criminelles qui opèrent actuellement" en Equateur, a expliqué à l'AFP Karen Sichel, une responsable juridique à la présidence.
Utilisé à quatre reprises depuis 2008, le référendum "va être une forme d'évaluation du gouvernement" qui, au sein du Congrès monocaméral, fait face à une opposition majoritaire mais fragmentée, analyse pour l'AFP le politologue Santiago Basabe.
Le parti présidentiel ne dispose que de 13 des 137 députés à cette Assemblée nationale. L'opposition, menée par "Révolution Citoyenne" pro-Rafael Correa, a appelé à voter non.
Une défaite "serait un coup dur pour le gouvernement, cela le fracturerait un peu plus, avec un scénario compliqué pour les deux années restantes", a commenté M. Basabe, professeur à la Faculté latino-américaine de sciences sociales (Flacso).
Parmi les questions soumises au vote, le président Lasso souhaite réduire le nombre de députés, proposition rejetée par l'opposition.
Le référendum entend également définir si les mouvements politiques locaux (le pays en compte 272, pour sept partis nationaux), doivent être contrôlés par l'organisme électoral, comme le sont les partis, alors que certaines de ses formations, souvent minuscules, sont soupçonnées d'être liées au trafic de drogue.
M. Lasso veut par ailleurs réduire les pouvoirs du Conseil de la participation citoyenne et du contrôle social (CPCCS), créé sous l'administration Correa, et chargé notamment de nommer diverses autorités comme le procureur général, le contrôleur de l'Etat, le médiateur et les membres de la commission électorale nationale (CNE).
Sur l'environnement, le référendum propose d'inclure les régions humides de jungles et marais dans la liste des zones protégées. Il propose aussi de verser des indemnités aux personnes et communautés autochtones qui protègent la nature. Traversé par la cordillères des Andes, l'Equateur abrite aussi une vaste zone amazonienne, menacée par l'exploitation pétrolière et les mines illégales.
F.Carstens--HHA