Retraites: la réforme dans l'arène de l'Assemblée, démarrage sous haute tension
D'emblée une série de rappels au règlement et une brève suspension de séance en raison du tumulte: le débat sur le projet de réforme des retraites a démarré de façon chaotique lundi à l'Assemblée nationale.
Le discours d'ouverture du ministre du Travail Olivier Dussopt a été retardé, dans un hémicycle surchauffé où les oppositions ont ferraillé sur des demandes de référendum sur la réforme, qui prévoit un recul de l'âge de 62 à 64 ans.
Les députés doivent se prononcer dans l'après-midi sur une motion de rejet de l'ensemble du projet de loi portée par LFI, puis une motion référendaire du groupe RN.
Mais d'autres parlementaires d'opposition ont réclaméà leur tour que leur propre demande de référendum, déposée in extremis, soit aussi soumise. Charles de Courson, du groupe indépendant Liot, à l'initiative avec des représentants de six groupes politiques, a dénoncé "un déni de démocratie", rejoint par des chefs de file de la Nupes.
La présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet n'a pas donné suite. Les oppositions ont alors bruyamment protesté, provoquant une brève interruption de séance.
"Est-ce que vous croyez que nous allons passer 15 jours comme ça dans l'hémicycle?", a demandé aux oppositions Mme Braun-Pivet. "On n'est pas dans un amphi, pas dans une manif".
Ces deux semaines prévues d'examen s'annoncent à haut risque sur cette réforme phare du second quinquennat d'Emmanuel Macron, qui ne dispose que d'une majorité relative à l'Assemblée.
- "Mobilisation massive constatée" -
Dans une concession de dernière minute, elle a annoncé que les personnes ayant commencé à travailler entre 20 et 21 ans pourront partir à la retraite à 63 ans, une extension du dispositif carrières longues.
Ce geste sera-t-il suffisant pour obtenir les voix, cruciales, de la droite? Non pour Aurélien Pradié notamment, qui pointe une "tromperie" et demande d'aller plus loin pour ceux ayant commencé à cotiser tôt.
Mais le président du groupe Olivier Marleix lui rétorque lundi dans le Figaro que Les Républicains n'avaient pas "demandé de modifier les règles d'accès aux carrières longues".
"Les enchères commencent à montrer les contradictions des LR", observe une source gouvernementale.
Côté syndicats, l'effort de Mme Borne n'a pas convaincu: une "rustine" qui "n'est pas la réponse" attendue "à la mobilisation massive constatée", dénonce Laurent Berger, patron de la CFDT.
Les journées de mobilisation des 19 et 31 janvier ont déjà réuni chaque fois plus d'un million de manifestants selon la police, plus de deux millions selon les organisateurs.
"On compte sur le fait qu'il y ait des mobilisations pour que les élus de la République prennent en compte l'avis des citoyens", a déclaré sur France 2 le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez.
- "Projet contre projet" -
Alors que les vacances scolaires ont commencé pour la zone A, le trafic sera fortement perturbé mardi à la SNCF et la RATP.
Pour la quatrième journée de mobilisation samedi, début des congés de la zone B, les syndicats de la SNCF ont décidé de ne pas appeler à la grève pour ne pas pénaliser les voyageurs.
Quelque 20.000 amendements par les députés ont été déposés sur le projet de loi, dont 13.000 par LFI. Mme Borne a dit espérer "un vrai débat, projet contre projet" plutôt que des "caricatures".
Mais ce flux d'amendements "permet de gérer un peu le tempo, accélérer, ralentir", au lieu de se laisser dicter le rythme, oppose l'Insoumis François Ruffin, qui veut avec la Nupes pouvoir relayer dans l'hémicycle "la vie des gens", "la France du réel".
Si l'Assemblée ne vient pas à bout des amendements d'ici le 17 février minuit, le texte passera au Sénat, du fait du choix de l'exécutif de recourir à un budget rectificatif de la Sécurité sociale.
Ce temps contraint est vivement critiqué par les oppositions, qui comptent néanmoins parvenir à discuter de l'article 7 consacré au report de l'âge de la retraite.
Les autres points chauds du texte se concentrent autour de la situation des femmes, qui pourraient être perdantes avec le recul de l'âge de départ, la pénibilité ou encore l'emploi des seniors.
R.Weber--HHA