Au Bélarus, dans une école militaire pour former "les futurs défenseurs de la patrie"
Les jeunes apprentis soldats bélarusses sont aux aguets: debout dans le froid et dans la neige, ils entendent au loin des tirs de chars. Ils sont là pour se préparer à un éventuel conflit, Minsk disant former "les futurs défenseurs de la patrie".
Sur le terrain d'entraînement, un tout nouveau BTR-82A russe et un autre tank modernisé envoient de lourdes déflagrations dans les airs à chaque fois qu'ils tirent.
Sur leurs épaules et leurs casques, le drapeau rouge et vert du Bélarus s'affiche fièrement.
Au stand de tir, le colonel Maxime Jouravlev dit aux journalistes de l'AFP invités dans le cadre d'un rare voyage de presse organisé par les autorités que ses hommes forment ici "les futurs défenseurs de la patrie".
Différents scénarios de conflit sont enseignés. Ce jour-là, les apprentis soldats s'entraînent notamment à l'évacuation d'un compagnon blessé dans la neige.
"Aujourd'hui, nous analysons les conflits modernes. A partir de ça, on prend ce qui est nouveau et on l'intègre à la formation militaire", explique-t-il.
Les officiels bélarusses rencontrés se gardent toutefois d'évoquer le conflit en Ukraine, où l'armada russe fait face depuis un an maintenant à la résistance de l'armée ukrainienne.
Ces dernières semaines, l'inquiétude a grandi de voir les forces du président Alexandre Loukachenko rejoindre le champ de bataille en Ukraine à la faveur d'une nouvelle offensive de Moscou. D'autant qu'un nombre inconnu mais conséquent de soldats russes restent déployés au Bélarus, qui sert depuis un an de base arrière pour l'armée de Moscou.
Jeudi, lors d'une rare rencontre avec la presse étrangère à laquelle l'AFP a participé, le dirigeant de cette ex-république soviétique a affirmé que son armée serait prête à se défendre en cas d'attaque de Kiev, qu'il a accusé de provocations.
Fin janvier, Vladimir Poutine avait demandé à son gouvernement de négocier la création de centres d'entraînement militaire communs avec le Bélarus. Plus de trois mois après que le Bélarus et la Russie eurent même annoncé la création d'une force militaire commune ayant, selon Minsk, une mission purement "défensive".
- Armée cyber -
Le président Loukachenko a répété à plusieurs reprises ne pas vouloir envoyer ses troupes en Ukraine, mais il a toutefois indiqué que son armée testait ses capacités à se mobiliser, en apprenant directement selon lui des "erreurs" russes.
En septembre 2022, Vladimir Poutine avait ordonné la mobilisation de centaines de milliers de réservistes, des civils donc, pour endiguer la dynamique ukrainienne, après plusieurs revers humiliants sur le terrain.
De nombreuses erreurs avaient été rapportées sur les réseaux sociaux, en plus de contestations inhabituelles dans certaines régions du pays voisin du Bélarus.
Selon M. Loukachenko, s'il devait déclarer une mobilisation dans son pays, "cela se passerait mieux qu'en Russie".
Dans la principale académie militaire du Bélarus, dans la banlieue de la capitale Minsk, des jeunes conscripts s'adonnent, eux, à imiter des combats sur des ordinateurs, encadrés par leurs supérieurs.
"Levez-vous!", ordonne un officier aux jeunes apprentis soldats présents. "Asseyez-vous!", lance-t-il sur un ton martial.
Selon les autorités, ces jeunes-là font partie d'une "unité informatique" de l'armée, au moment où les cyberattaques ont explosé à la faveur du conflit en Ukraine, devenant une partie intégrante des conflits modernes dits "hybrides".
Plus tôt dans le mois, Minsk avait appelé à renforcer ses capacités cyber.
Minsk était autrefois un haut-lieu des entreprises des hautes technologies, mais de nombreux spécialistes ont quitté le pays ces dernières années, notamment après les grandes manifestations de 2020, sévèrement réprimées par le pouvoir.
Dans une autre salle, des apprentis pilotes tapotent derrière leurs ordinateurs, à l'écoute d'ordres venant de faux contrôleurs aériens, le tout devant simuler des vols virtuels sur des avions de chasse.
Dans les couloirs, les références au passé du Bélarus sont visibles partout, entre symboles biélorusses et soviétiques et autres objets évoquant la Seconde Guerre mondiale.
"Connaître l'histoire militaire permet de promouvoir le sens tactique", relève un officier de l'armée.
H.Graumann--HHA