Le FMI rappelle le Sri Lanka à ses engagements contre la corruption après son renflouement
Le Fonds monétaire international (FMI) a appelé le Sri Lanka mardi à ne pas laisser la corruption entraver le plan d'aide de 2,9 milliards de dollars qu'il lui a accordé lundi et qui a été accueilli de manière mitigée dans le pays.
Ce renflouement était conditionné notamment aux garanties des autorités sri-lankaises en matière de lutte contre la corruption, profondément ancrée et tenue en partie responsable des graves difficultés économiques du pays, qui a fait défaut sur sa dette extérieure en avril 2022.
L'accord trouvé début mars avec la Chine pour la restructuration de ses prêts au Sri Lanka a aussi ouvert la voie à ce financement.
Le chef de la mission du FMI au Sri Lanka Peter Breuer a toutefois rappelé mardi que le gouvernement s'était engagé à promulguer des lois anticorruption plus strictes, "indispensables pour s'assurer que les bénéfices durement gagnés grâce aux réformes profitent au peuple sri-lankais".
Dans une allocution, le président sri-lankais Ranil Wickremesinghe a annoncé que ce plan de sauvetage permettrait de lever les interdictions d'importations de certains produits, imposées en raison d'une pénurie de devises étrangères.
"Le monde a accepté que le Sri Lanka n'était plus un pays en banqueroute", s'est-il félicité. "Les affaires normales peuvent reprendre".
- "Nous sommes fichus" -
Les Sri-Lankais semblaient moins enthousiastes.
"Ce n'est pas quelque chose que nous devrions célébrer fièrement", a estimé auprès de l'AFP Charlotte Somaseeli, 67 ans. "C'est un signe de la situation désespérée dans laquelle nous sommes", a ajouté cette policière à la retraite.
"En gros, nous sommes fichus", a lancé de son côté Gehard Mendis, chef d'entreprise de 59 ans. "Le plan du FMI est aussi un prêt. Cela va augmenter le poids de notre dette".
Colombo s'était tourné vers l'institution monétaire basée à Washington, écrasé par le poids de sa dette extérieure (46 milliards de dollars).
Ce pays de 22 millions d'habitants est depuis la pandémie englué dans une grave crise économique et sociale ayant, entre autres, provoqué la démission et la fuite de l'ex-président Gotabaya Rajapaksa.
Son successeur Ranil Wickremesinghe a conduit les négociations avec le FMI et promis des mesures d'austérité pour redresser les finances publiques.
Sa décision de relever les impôts a déjà suscité de nouvelles tensions sociales, avec une grève nationale lancée le 15 mars, poussant le gouvernement à déployer des soldats armés dans les gares et le port de Colombo.
Le Sri Lanka, dont l'économie est basée sur le thé et le tourisme, n'en est pas à sa première crise et a déjà connu 16 plans d'aide du FMI depuis 1965.
Régulièrement, "nous nous tournons vers le Fonds parce que nous ne semblons pas capable de remettre de l'ordre dans notre maison", a estimé Murtaza Jafferjee, du groupe de réflexion basé à Colombo, Advocata Institute, interrogé par l'AFP.
"Mais il y a de l'espoir car la sortie de route a cette fois été d'une telle ampleur, qu'il va y avoir une prise de conscience et il y aura des changements durables", a-t-il ajouté.
L'île de l'Océan Indien a connu en 2022 sa pire récession économique (-7,8%) depuis son indépendance, en 1948.
J.Berger--HHA