Retraites: Macron prêt à "endosser l'impopularité" et à la fermeté face aux débordements
Emmanuel Macron persiste et signe: la très contestée réforme des retraites doit être appliquée "avant la fin de l'année", a réaffirmé sur TF1 et France 2 le chef de l’État qui accepte "d'endosser l'impopularité" et campe sur sa ligne de fermeté face aux débordements dans la rue.
Lors d'un entretien de 35 minutes, le président a tenté de tracer des perspectives à court terme, mais il a avant tout dû une nouvelle fois plaider pour une réforme "nécessaire" qu'il ne conduit pas "par plaisir".
M. Macron, qui avait écarté mardi toute perspective immédiate de remaniement, de dissolution ou de référendum, a égrené les arguments déployés par son camp depuis l'activation du 49.3 sur cette réforme controversée et la motion de censure contre son gouvernement qui a échoué à neuf voix près.
Cette réforme a été "enrichi(e) par les parlementaires", "votée par le Sénat" et "adoptée par l'Assemblée suite à l'utilisation de l'article dit 49.3, et donc par un vote d'une motion de censure contre le gouvernement qui a échoué", a plaidé M. Macron, dans l'attente de la décision du Conseil constitutionnel.
"S'il faut endosser l'impopularité aujourd'hui, je l'endosserai", a assumé le chef de l’État qui est revenu sur ses déclarations de la veille à l’Élysée devant des parlementaires de sa majorité, sur "la foule" qui n'a "pas de légitimité face au peuple qui s'exprime, souverain, à travers ses élus".
- Capitole et Brasilia -
Des propos qui visaient les élus ciblés par les violences, a-t-il assuré mercredi, citant l'invasion du Capitole par les partisans de Donald Trump et des lieux de pouvoirs à Brasilia par ceux de Jaïr Bolsonaro. "On ne peut accepter ni les factieux, ni les factions", "on ne tolèrera aucun débordement" face aux "groupes qui utilisent la violence", a-t-il martelé mercredi.
Cette sortie avait suscité une certaine gêne jusqu'au sein de son camp. "Je n'aurais pas dit les choses comme ça", avait réagi dans la matinée mercredi François Bayrou.
La parole d'Emmanuel Macron, en retrait depuis janvier sur ce dossier phare de son second quinquennat qui a viré à la crise politique, était très attendu, alors que des manifestations se multiplient depuis le 49.3 et qu'une nouvelle journée de grève et de manifestations est programmée jeudi par l'intersyndicale.
Mercredi, plusieurs actions de blocage contre la réforme des retraites, touchant dépôts pétroliers, ports, routes, le secteur électrique et une université se sont déroulées mercredi matin à travers le pays.
Aux stations-service, la situation se dégrade légèrement, avec 14,30% des stations en pénurie d'au moins un type de carburant contre 12% mardi, et 7,13% sont à sec, contre 6% mardi.
- "Co-construction" à l'Assemblée -
Mercredi matin, l'A55 dans le sens Fos-sur-Mer-Marseille a été fermée en raison de feux de palettes. Le port de Marseille-Fos était en outre totalement bloqué dans le cadre d'une journée "ports morts" à l'appel de la CGT tandis que des actions coup de poing sont également menées aux abords de la zone portuaire de Capécure, à Boulogne-sur-Mer.
Le dépôt pétrolier de Puget-sur-Agens (Var) est bloqué par des manifestants, de même que deux ronds-points desservant deux dépôts pétroliers au nord de Bordeaux.
La veille, de nouvelles manifestations à Paris ou à Nantes ont été émaillées d'incidents. Au total, de source policière, 128 interpellations ont eu lieu en France, dont 81 à Paris. 61 policiers et gendarmes ont été blessés.
Dans les écoles, le Snuipp-FSU, premier syndicat dans les écoles maternelles et élémentaires, prévoit entre 40 et 50% des professeurs du primaire en grève jeudi.
Désireux de sortir de cette séquence retraites, le président a tenté mercredi de donner des perspectives. Charge à Élisabeth Borne, à qui il a renouvelé sa confiance, de "bâtir un programme de gouvernement" susceptible "d'élargir" la majorité relative à l'Assemblée, dans une démarche de "co-construction d'un agenda parlementaire avec l'ensemble des forces des deux chambres".
Premier changement d'agenda: le projet de loi immigration, présenté comme la prochaine victime des oppositions à l'Assemblée, sera scindé en "plusieurs textes" dans "les prochaines semaines".
M. Macron veut également "réengager" un dialogue avec les partenaires sociaux sur les conditions de travail. Mais "il faut attendre quelques jours, quelques semaines", a-t-il observé, alors que les syndicats, jeudi, battront à nouveau le pavé.
U.Smith--HHA