Les Monténégrins ont voté pour leur président après des mois de blocage
Les Monténégrins ont voté dimanche pour choisir leur chef de l'Etat au second tour d'une présidentielle qui met aux prises le novice Jakov Milatovic et le sortant Milo Djukanovic, vétéran de la scène politique du minuscule pays des Balkans.
Le scrutin est déterminant pour l'équilibre des pouvoirs dans ce pays riverain de l'Adriatique à l'approche de législatives anticipées convoquées pour le 11 juin.
Cela fait des mois que le pays est bloqué après le renversement en août 2022 du gouvernement, qui gère toutefois depuis les affaires courantes.
Les bureaux de vote ont fermé à 18H00 GMT et des résultats non officiels sont attendus dans la soirée. A 16H00 GMT, la participation était de près de 63%, soit six points de plus qu'au premier tour il y a deux semaines.
Milo Djukanovic, qui domine le pays depuis trois décennies, avait alors recueilli 35,4% des voix contre 28,9% pour Jakov Milatovic.
Les analystes estiment cependant que l'économiste pro-Européen de 36 ans a des chances de l'emporter grâce à une plus grande réserve de voix. Il peut compter aussi sur les électeurs avides de changement, qui ne veulent plus de Milo Djukanovic, 61 ans, ni de sa formation, le Parti démocratique des socialistes (DPS).
"Je suis convaincu de ma victoire", a déclaré Jakov Milatovic en votant. "Elle représentera la défaite finale du symbole de l'ancien régime" et nous "ferons un pas de géant vers un Monténégro réconcilié, plus riche, plus juste".
- Défaite historique -
Le DPS a connu une défaite historique aux législatives de 2020. Depuis lors, l'ancienne République yougoslave va de crise politique en crise politique et a subi la chute de deux cabinets.
Milo Djukanovic est arrivé aux commandes à 29 ans, soutenu par l'homme fort de Belgrade Slobodan Milosevic.
Mais à mesure que la Serbie devenait un paria sur la scène internationale, il a pris ses distances. Il s'est rapproché de l'Occident, a rompu avec Belgrade et obtenu l'indépendance du Monténégro lors d'un référendum en 2006.
Sous l'égide de Milo Djukanovic et du DPS, le Monténégro a rejoint l'Otan, est devenu candidat à l'Union européenne et est sorti de la sphère d'influence russe.
Après avoir voté dimanche, il a promis de poursuivre sur la voie européenne.
"Je pense qu'une meilleure ère s'ouvre durant laquelle le Monténégro continuera à avancer efficacement vers son but européen", a-t-il lancé.
Ses contempteurs l'accusent cependant de corruption généralisée et de liens avec le crime organisé, ce que l'intéressé dément avec force.
"On a un homme au pouvoir ici depuis trente ans, qui est l'incarnation même de la dictature, de l'abus de pouvoir, qui a rendu la corruption possible, qui a permis à la criminalité de s'épanouir", déclare à l'AFP Mladen Vukovic, médecin à Podgorica
- Rôle de représentation -
Milo Djukanovic a mené campagne en mettant en doute la sincérité de l'ancrage européen de son rival et de son mouvement "l'Europe maintenant", tout en l'accusant d'être vulnérable à l'ingérence serbe.
"Le Monténégro a toujours été indépendant. Nous ne voulons pas dépendre d'un autre pays, que ce soit politiquement, économiquement ou autre", dit Kata Lekovic, enseignante retraitée de 72 en glissant son bulletin dans l'urne. "Djukanovic peut nous assurer ça".
Depuis des années, Milo Djukanovic cherche à limiter l'influence de la Serbie et à consolider une identité nationale séparée du Monténégro. Une tâche peu aisée dans un pays où un tiers des 620.000 habitants s'identifient comme serbes.
Durant les derniers jours de campagne, il a cherché à séduire les minorités et la diaspora.
Jakov Milatovic, un ancien de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), est entré en politique en devenant ministre du Développement économique dans le premier gouvernement formé après les législatives de 2020.
Qualifié de populiste par certains, ce père de trois enfants s'est fait particulièrement apprécier en imposant un programme économique controversé qui a quasiment doublé le salaire minimum à 450 euros.
Pour de nombreux électeurs, le scrutin doit déboucher sur de meilleures conditions économiques au Monténégro qui subit, comme le reste des Balkans, l'exode de sa jeunesse.
En tout état de cause, le président a essentiellement un rôle de représentation et le Premier ministre détient les principaux leviers du pouvoir.
str-rus-ds-ev/cn
E.Bekendorp--HHA