Le procès de l'attentat de la rue Copernic s'est ouvert à Paris, 43 ans après
Le procès de l'attentat contre la synagogue de la rue Copernic, qui a fait quatre morts et des dizaines de blessés le 3 octobre 1980, s'est ouvert lundi matin à Paris, 43 ans après les faits et en l'absence de l'unique accusé.
Hassan Diab, un Libano-Canadien de 69 ans qui a toujours clamé son innocence, ne s'est pas présenté à l'ouverture des débats, comme il l'avait déjà fait savoir à la cour lors d'un interrogatoire préalable.
La cour d'assises spéciale de Paris a par conséquent ordonné que l'accusé, "absent sans excuse valable", soit jugé par défaut, comme s'y attendaient les parties civiles, rares sur les bancs de la salle d'audience lundi.
Cet universitaire était reparti libre au Canada en janvier 2018 après avoir bénéficié dans un premier temps d'un non-lieu dans ce dossier, l'un des plus longs de l'antiterrorisme français.
La cour aurait pu théoriquement décider de délivrer un nouveau mandat d'arrêt à son encontre mais elle aurait dû de facto renvoyer l'audience.
"Ce procès doit intervenir", a estimé l'un des avocats généraux, Benjamin Chambre, tout en s'élevant contre "la lâcheté" de l'accusé, son "manque de confiance" et sa "grande infamie faite" à la cour d'assises.
Pour les parties civiles, après quatre décennies d'attente et de revirements judiciaires, "c'est la fin d'un très long calvaire", avait affirmé avant l'ouverture de l'audience l'avocat de certaines d'entre elles, Me Bernard Cahen.
Le 3 octobre 1980, vers 18H35, l'explosion de la bombe posée sur une moto à proximité de la synagogue de la rue Copernic, dans le XVIe arrondissement de Paris, a tué quatre personnes --un étudiant qui passait à moto, un chauffeur privé, une journaliste israélienne et un gardien d'immeuble-- et en a blessé 46.
Pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la communauté juive de France était la cible d'une attaque meurtrière.
Jamais revendiqué, l'attentat avait été attribué au Front populaire de libération de la Palestine-Opérations spéciales (FPLP-OS), un groupe dissident du FPLP.
- Passeport -
Des renseignements ont désigné en 1999 Hassan Diab comme celui ayant confectionné l'engin explosif et chargé sur la moto les dix kilos de pentrite qui ont explosé devant l'édifice religieux.
Outre ces renseignements, l'accusation met en avant la ressemblance de l'ancien étudiant de Beyrouth avec des portraits-robots réalisés à l'époque, le témoignage d'un couple affirmant qu'il appartenait aux groupes palestiniens au début des années 1980 ainsi que les comparaisons entre l'écriture de Hassan Diab et celle d'une fiche d'hôtel remplie par l'homme qui a acheté la moto.
Ces expertises graphologiques ont été âprement débattues au cours de l'instruction et devraient l'être à nouveau au procès.
La pièce centrale de l'accusation reste la saisie en 1981 à Rome d'un passeport au nom de Hassan Diab, avec des tampons d'entrée et de sortie d'Espagne, pays d'où serait parti le commando, à des dates concordantes avec l'attentat.
"Il était au Liban au moment des faits", en train de passer ses examens à l'université de Beyrouth, "nous l'établissons", a souligné avant le procès Me William Bourdon.
D'anciens étudiants et l'ex-épouse de Hassan Diab avaient corroboré ses dires, rappelle sa défense.
"Nous entendons que du côté des parties civiles, il y ait une revendication d'avoir à tout prix un coupable, nourrie par l'autorité judiciaire qui leur a laissé entendre, à tort, que (...) c'était le seul +coupable+ qu'on pouvait leur offrir", a estimé Me Bourdon.
"Ce dossier aurait pu, aurait dû se terminer au moment de l'ordonnance de non-lieu", une ordonnance "extrêmement motivée" qui avait conclu au manque de charges "suffisamment probantes" pour renvoyer Hassan Diab devant une cour d'assises, a ajouté le conseil.
Cette décision a été infirmée trois ans plus tard.
Jugé pour assassinats, tentatives d'assassinats et destructions aggravées en relation avec une entreprise terroriste, l'ancien professeur de sociologie encourt la réclusion criminelle à perpétuité.
Le verdict est attendu le 21 avril.
U.Smith--HHA