Retraites: la rencontre entre Borne et l'intersyndicale se solde par un "échec"
La rencontre tant attendue entre Elisabeth Borne et l'intersyndicale pour sortir du conflit des retraites s'est soldée mercredi matin par un "échec" selon les syndicats, qui pointent le refus de la Première ministre de retirer la réforme contestée.
Les leaders des huit organisations syndicales arrivés peu après 10H00, ensemble et à pied, à Matignon sont ressortis environ une heure après et c'est le patron de la CFTC, Cyril Chabanier, au nom de l'intersyndicale qui a résumé le contenu des conversations sur le perron.
"Nous avons redit à la Première ministre qu’il ne saurait y avoir d’autre issue démocratique que le retrait du texte. La Première ministre a répondu qu’elle souhaitait maintenir son texte, une décision grave", a déclaré M. Chabanier. "C’est forcément un échec quand la Première ministre ne fait aucune ouverture sur cette discussion. Donc oui c’est forcément un échec".
Les syndicalistes avaient prévenu qu'ils quitteraient la réunion si Elisabeth Borne refusait de parler du recul de l'âge de départ à 64 ans, qui cristallise la colère.
C'est la première fois qu'ils sont reçus à Matignon depuis la présentation le 10 janvier de la réforme, qui a généré une mobilisation inédite dans la rue.
La Première ministre avait promis qu'elle serait "à l'écoute de tous les sujets" que les syndicats voudraient aborder en dépit de "points de désaccord", en particulier le recul de l'âge.
- Impasse -
Le leader de la CFDT Laurent Berger qui a dit s'en remettre à "la sagesse du Conseil constitutionnel" qui doit rendre sa décision le 14 avril, a appelé "un maximum de travailleuses et travailleurs à rejoindre les cortèges demain", date d'une 11e journée de mobilisation contre la réforme.
"On ne peut pas passer à autre chose tant que cette réforme n'est pas retirée", a dit Sophie Binet, secrétaire générale nouvellement élue à la tête de la CGT après la réunion.
"L'intersyndicale sera unie jusqu'au bout", a-t-elle affirmé, balayant les spéculations sur les récentes dissonances entre la CFDT, qui réclame de "retirer ou suspendre" le texte, et la CGT, qui veut le "retrait" pur et simple.
Du côté des opposants à la réforme comme de l'exécutif, personne ne se faisait d'illusions sur l'issue de la rencontre
Pour un ministre de premier plan, la rencontre entre Mme Borne et les syndicats était "déjà écrite". Celui-ci tablant avant même qu'elle n'ait lieu sur une impasse.
Elisabeth Borne "ne nous a absolument rien sorti de différent", a déploré Benoît Teste, secrétaire général de la FSU, soulignant les "visages fermés" de ces interlocuteurs.
- "Autre chose" -
"On est dans une impasse" car "tant qu'il n'y aura pas de retrait (...) on ne passera pas à autre chose", avait observé la patronne des écologistes Marine Tondelier mardi à l'issue d'une rencontre avec Elisabeth Borne, qui consulte tous azimuts pour sortir de la crise.
"Et quand on est dans une impasse, il faut faire demi-tour", a renchéri la leader du PS Olivier Faure, qui a trouvé la Première ministre "démunie" de solutions.
La réforme a généré une mobilisation quasi hebdomadaire inédite allant jusqu'à 1,3 million de personnes dans la rue le 7 mars (selon les autorités), soit davantage qu'en 1995 ou 2010. Et ces manifestations ont connu un regain de tensions après l'adoption sans vote de la réforme au Parlement, via le 49.3.
Les syndicats avaient déjà demandé, en vain, d'être reçus par Emmanuel Macron. Elisabeth Borne les avaient alors renvoyés au ministère du Travail.
Côté gouvernement, le souhait c'est de "négocier autre chose" que les retraites, selon un ministre, "inquiet du niveau de tension", en attendant la décision du Conseil constitutionnel.
Elisabeth Borne considère qu'il y a "beaucoup de sujets à aborder" sur "la qualité de vie au travail, sur les fins de carrière, sur la prévention de la pénibilité".
Or pour Cyril Chabanier de la CFTC: les syndicats refusent de "tourner la page et d'ouvrir, comme le souhaite le gouvernement, d'autres séquences de concertations".
L'exécutif mise cependant sur la fatigue des manifestants alors que les vacances de printemps débutent le 8 avril. A l'inverse, les syndicats entendent jeudi "montrer que la mobilisation est toujours puissante".
Laurent Berger espère dans L'Obs que le Conseil constitutionnel "censurera la loi". Car "s'il y a censure de points particuliers comme l'index senior, la pénibilité au travail, etc., mais pas des 64 ans, alors ça ne répondra en rien à la conflictualité sociale en cours", selon lui.
Les syndicats comme la gauche comptent également sur la validation par la Haute juridiction du référendum d'initiative partagée (RIP) sur la réforme.
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E.Steiner--HHA