Birmanie: condamnations après une attaque attribuée à la junte contre un village
Les Nations unies, Berlin et Washington ont condamné mardi une nouvelle attaque aérienne attribuée à la junte birmane contre un village dans une zone tenue par les rebelles, qui aurait fait des dizaines de morts.
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres "condamne fermement l'attaque menée aujourd'hui par les forces armées de Birmanie (et) demande que les responsables répondent de leurs actes", a déclaré son porte-parole Stéphane Dujarric.
M. Guterres "réitère son appel aux militaires pour qu'ils mettent fin à la campagne de violence contre la population" birmane, a ajouté le porte-parole.
Auparavant, le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme Volker Turk s'était dit "horrifié" après cette attaque, attribuée à la junte.
"Il semble que des enfants qui dansaient, ainsi que d'autres civils, lors de la cérémonie d'ouverture d'un centre du village de Pazi Gyi, dans le district de Kanbalu, fassent partie des victimes", a indiqué M. Turk dans un communiqué.
Il a décrit comment "un hélicoptère de combat aurait ensuite tiré sur ceux qui fuyaient la salle", puis il a fait état d'informations selon lesquelles une centaine de villageois auraient été tués dans ces frappes tôt mardi matin dans la région de Sagaing, un bastion de l'opposition dans le centre du pays
Washington s'est dit également "profondément préoccupé" par ces attaques, qui "soulignent une fois de plus le mépris du régime pour la vie humaine et sa responsabilité dans la terrible crise politique et humanitaire qui sévit en Birmanie depuis le coup d'Etat de février 2021", a déclaré dans un communiqué le porte-parole du Département d'Etat, Vedant Patel.
"Les Etats-Unis appellent le régime birman à cesser ces violences atroces, à permettre un accès humanitaire sans entrave et à respecter les véritables aspirations démocratiques et inclusives du peuple birman", a-t-il ajouté.
Des témoins contactés par l'AFP ont également fait état d'une centaine de morts. Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux (dont l'AFP n'a pas pu confirmer l'authenticité) montrent des corps éparpillés dans des maisons en ruines.
Le service birman de la BBC, The Irrawaddy et Radio Free Asia, avaient rapporté plus tôt des frappes aériennes contre le village de Pazi Gyi, dans le district de Kantbalu, au nord de Mandalay.
- Une centaine de morts? -
Selon eux, au moins cinquante personnes auraient été tuées. Mais le bilan pourrait s'élever à cent morts, selon un secouriste d'un groupe rebelle armé, qui a indiqué à l'AFP la présence de femmes et d'enfants parmi les victimes.
M. Turk a accusé l'armée birmane d'avoir une fois de plus ignoré "les obligations juridiques claires (...) de protéger les civils dans la conduite des hostilités" et d'avoir fait preuve d'un "mépris flagrant pour les règles du droit international qui s'y rapportent".
Dans un tweet, le ministère allemand des Affaires étrangères a également condamné mardi soir "le raid aérien de l'armée birmane qui a tué des dizaines de civils, dont des enfants".
"Nos pensées vont aux victimes et aux familles. Nous exigeons que le régime cesse toute violence contre la population immédiatement", a ajouté le texte.
Le Gouvernement d'unité nationale (NUG), un organe fondé par d'anciens députés du parti d'Aung San Suu Kyi pour beaucoup en exil et qui fédère un parti de l'opposition à la junte, a dénoncé un "nouvel exemple de l'usage aveugle de la force extrême contre des civils innocents".
Un porte-parole de la junte n'a pas pu être joint par l'AFP.
La région de Sagaing, proche de Mandalay, la deuxième ville du pays, oppose une farouche résistance à la junte, et d'intenses combats s'y déroulent depuis des mois.
M. Turk a estimé qu'il y avait "des motifs raisonnables de croire que l'armée et les milices qui lui sont affiliées sont responsables d'un large éventail de violations des droits humains et d'abus depuis le 1er février 2021".
La Birmanie est déchirée par un violent conflit entre la junte et ses opposants depuis le coup d'Etat du 1er février 2021.
L'armée birmane mise sur son avantage aérien, grâce à ses jets de fabrication russe et chinoise, pour compenser ses difficultés sur le terrain, face à des groupes rebelles qui contrôlent des pans du pays.
Les Nations unies ont compté plus de 300 frappes aériennes en 2022, ainsi que plusieurs incidents comprenant des victimes civiles.
H.Beehncken--HHA