Au Yémen en guerre, les familles de prisonniers libérés soulagées
A Sanaa, capitale du Yémen, Yahia Abou Korra attend avec impatience le retour vendredi de son fils, prisonnier de guerre "depuis cinq ans". Et à l'approche des célébrations de la fin du ramadan la semaine prochaine, il se réjouit de cette "double fête".
Une vaste opération d'échange de prisonniers a débuté vendredi au Yémen entre les camps ennemis qui s'affrontent depuis huit ans: d'un côté, les rebelles Houthis proches de l'Iran, au pouvoir depuis 2014 à Sanaa, et de l'autre, le gouvernement appuyé par l'Arabie saoudite, siégeant à Aden (sud) depuis qu'il a été chassé de la capitale.
A l'entrée de l'aéroport de Sanaa, sous l'ombre des arbres sur le trottoir, des centaines de proches de prisonniers attendent l'arrivée de leurs fils, leurs frères ou leurs pères.
"J'éprouve la même chose que tout le monde ici", dit à l'AFP Yahia Abou Korra, se réjouissant comme les autres, de voir leurs familles réunies pour la fête de l'Aïd el-Fitr, qui marque la fin du mois de jeûne musulman.
Des dizaines de personnes se sont même rassemblées sur le tarmac à l'approche de l'avion de la compagnie Yemenia, dont le fils de Abdallah Al-Hajouri lui aussi emprisonné depuis cinq ans. "Il me manque tellement. Il me tarde de le revoir", confie-t-il à l'AFP.
Fin mars, au début du ramadan, le gouvernement et les rebelles avaient conclu un accord à Berne, en Suisse, pour échanger près de 900 prisonniers. La dernière opération de cette ampleur remonte à octobre 2020, lorsque plus de 1.000 détenus avaient été libérés.
Cette opération supervisée par le Comité international de la Croix-Rouge intervient dans un contexte d'apaisement régional, l'Arabie saoudite et l'Iran ayant décidé de réchauffer leurs relations après des années de froid diplomatique et d'opposition par fronts interposés au Moyen-Orient.
Une délégation saoudienne a quitté Sanaa jeudi sur un "accord préliminaire" de trêve avec les rebelles, selon ces derniers, qui ont qualifié les négociations de "sérieuses et positives".
- "Beaucoup souffert" -
A Aden, des milliers de familles se sont aussi rassemblées à l'aéroport pour accueillir les prisonniers arrivés de Sanaa, après avoir été libérés par les rebelles.
Père d'un détenu, Nasser Al-Dhalei parle de "sentiments indescriptibles". "Une grande joie s'est répandue dans toute la société yéménite avec la libération des prisonniers politiques et de guerre", dit-il à l'AFP.
Parmi ces détenus, Salim Saleh Al-Jamzi, a été libéré après 3 ans et 8 mois dans les geôles des rebelles. "Dieu soit loué pour nous avoir sortis de ces prisons injustes", se réjouit-il.
Sous la supervision des autorités gouvernementales, de grands bus blancs se sont arrêtés avec à leur bord des prisonniers Houthis en robes et turbans traditionnels, emportant de petits sacs à dos ou quelques affaires, avant d'embarquer dans l'avion qui les emmène à Sanaa.
Certains détenus aident les plus âgés et affaiblis à descendre, dont certains en fauteuil roulant.
Parmi les combattants rebelles libérés, Hamid Hussein tient à "remercier Dieu pour cette joie". Mais, s'il faut, faute de trêve ou d'avancées, il se dit prêt à "retourner au front".
La guerre au Yémen provoqué l'une des pires crises humanitaires au monde, avec des centaines de milliers de morts et des millions de déplacés, dans un contexte d'épidémies, de manque d'eau potable et de faim aiguë. Plus des trois quarts de la population dépendent d'une aide internationale qui ne cesse pourtant de diminuer.
H.Beehncken--HHA