Retraites: après la validation de la loi, réparer les dégâts et relancer le quinquennat
La réforme est passée, les difficultés demeurent: au lendemain de la validation de l'essentiel de la réforme des retraites par le Conseil constitutionnel, et sa promulgation express, Emmanuel Macron manoeuvre pour relancer son deuxième mandat, avec une prise de parole attendue dans les prochains jours.
Mais gare au triomphalisme. Aucune réaction n'est parvenue de l’Élysée après la décision du Conseil constitutionnel, qui n'a censuré que quelques dispositions, Emmanuel Macron laissant ce soin à Élisabeth Borne et à son gouvernement.
Le chef de l’État devrait prendre la parole en début de semaine prochaine, selon plusieurs sources au sein de l'exécutif. Il réunira les cadres de la majorité lundi à l’Élysée.
En revanche, la rencontre proposée par Emmanuel Macron aux syndicats pour mardi devra sans doute attendre: l'intersyndicale n'entend pas se rendre à l’Élysée avant le 1er mai, traditionnel rendez-vous social qu'elle souhaite transformer en "journée de mobilisation exceptionnelle et populaire" contre le cœur de la réforme validée par le Conseil constitutionnel: la retraite à 64 ans.
Renouer avec les syndicats ne sera pas chose aisée. "Il y aura du ressentiment, des cicatrices", glisse un proche du chef de l’État.
-Cortèges sauvages-
Dans la rue, des manifestations ont accompagné vendredi la décision du Conseil, accueillie par des huées des quelque 4.000 manifestants rassemblés devant l'Hôtel de ville de Paris à l'appel de plusieurs syndicats dont la CGT et FO.
Plusieurs centaines de personnes sont ensuite parties en cortèges sauvages émaillés d'incidents dans le centre de la capitale, entraînant l'interpellation de 112 personnes, selon la préfecture de police.
Quelques centaines de manifestants se sont également rassemblés à Lille, Toulouse, Strasbourg ou encore à Marseille après l'annonce de la décision du Conseil.
A Rennes, notamment la porte d'un poste de police du centre-ville a été incendiée avant d'être éteint. Même scénario sur une des portes du centre des congrès sis dans l'ancien couvent des Jacobins.
La veille, jeudi, la 12e journée de mobilisation avait livré le deuxième plus faible score de mobilisation depuis le début du mouvement (380.000 manifestants selon le ministère de l'Intérieur, 1,5 million selon la CGT).
Le mouvement social, l'un des plus importants des dernières décennies, a débuté après la présentation de la réforme le 10 janvier et à donné lieu à des manifestations massives, alors que le texte était examiné au Parlement dans une ambiance très tendue entre gouvernement et oppositions.
En attendant la parole présidentielle, Élisabeth Borne s'exprimera samedi après-midi, à l'occasion du Conseil national du parti présidentiel Renaissance à Paris.
Fragilisée depuis l'adoption de la réforme par 49.3 à l'Assemblée, la Première ministre a fait part cette semaine des conclusions de ses consultations à Emmanuel Macron, qui l'avait chargée de trouver les voies pour "élargir la majorité". Sans résultat probant à ce stade.
Devant les cadres de Renaissance, Mme Borne pourrait livrer quelques pistes pour la suite... dont elle devrait continuer à faire partie. Mais les mêmes difficultés l'attendraient alors à l'Assemblée, faute de majorité absolue.
-"1er mai décisif"-
Les oppositions promettent en outre de ne pas désarmer. "Le sort politique de la réforme des retraites n'est pas scellé" et son entrée en vigueur "marquera la rupture définitive entre le peuple français et Emmanuel Macron", a estimé la leader du Rassemblement national, Marine Le Pen.
Pour La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon a évoqué un "1er mai décisif", en accusant le Conseil constitutionnel d'avoir "agrav(é) la crise". "Il faut rassembler réellement toutes les forces qui veulent s’opposer pour que le dernier mot soit à la souveraineté populaire et non à la monarchie présidentielle", a-t-il dit sur sa chaîne Youtube.
Le Conseil constitutionnel statuera le 3 mai sur le deuxième projet de référendum d'initiative partagée (RIP) visant à contrecarrer la réforme, après le rejet vendredi de la première tentative portée par les parlementaires de gauche.
Députés et sénateurs socialistes avaient par ailleurs déjà annoncé vendredi leur intention de déposer un texte législatif demandant l'abrogation de la réforme des retraites "si le président de la République promulgue".
Th.Frei--HHA