Hamburger Anzeiger - Au Tadjikistan, la vie en suspens des réfugiés afghans

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Au Tadjikistan, la vie en suspens des réfugiés afghans
Au Tadjikistan, la vie en suspens des réfugiés afghans / Photo: Nasim ISAMOV - AFP

Au Tadjikistan, la vie en suspens des réfugiés afghans

Laçant ses chaussures de football assorties à son voile orange, Bibikhawa Zaki profite d'un rare moment d'évasion. Comme des milliers d'autres Afghans réfugiés au Tadjikistan, la jeune femme attend d'enfin sortir des limbes de ce pays d'Asie centrale pour refaire sa vie au Canada.

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Quelques mois avant la prise de Kaboul par les talibans à l'été 2021, elle a vécu le destin de milliers de familles afghanes qui ont traversé la frontière montagneuse séparant l'Afghanistan et le Tadjikistan.

"Les talibans ont attaqué ma belle-soeur. Ils ont menacé de mort ma famille, nous avons dû partir", confie à l'AFP cette ancienne professeure d'anglais à Kaboul.

"Mais quand je joue au football, je suis heureuse, je ne pense pas au reste", souligne la jeune femme de 25 ans.

Autour d'elle, une cinquantaine de jeunes Afghanes s'entraînent dans ce club fondé par des compatriotes à Vakhdat.

Situé à une demi-heure de la capitale Douchanbé, cette ville abrite l'immense majorité des réfugiés afghans. Bien que le Tadjikistan en accueille depuis le milieu des années 1990, ils ont interdiction de s'installer dans les plus grandes villes du pays.

En Asie centrale, le Tadjikistan reste le principal adversaire des talibans, marqué par sa guerre civile avec des combattants islamistes et de nombreux accrochages transfrontaliers depuis les années 2000 impliquant des groupes jihadistes.

Son président, Emomali Rakhmon s'est aussi érigé en défenseur des droits des minorités en Afghanistan, où les Tadjiks forment le deuxième groupe ethnique.

Si Bibikhawa Zaki fait partie des derniers réfugiés arrivés au Tadjikistan, d'autres naviguent dans un brouillard administratif depuis de longues années.

Selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, quelque 10.000 réfugiés afghans, souvent démunis, résident aujourd'hui au Tadjikistan, la plus pauvre des ex-Républiques soviétiques, qui vit en grande partie grâce aux envois de fonds de millions de travailleurs émigrés.

- Attente -

Et les annonces invitant les Tadjiks à aller travailler en Russie ornent nombre de lampadaires et échoppes de Vakhdat.

Dans un pays qui peine à assurer la subsistance de sa propre population, les Afghans sont obligés de se débrouiller.

Faire valoir des droits n'est en outre pas chose aisé au Tadjikistan, où la liberté d'expression est strictement limitée. Et bien sûr, ils ne peuvent compter sur l'aide de leur ambassade qui aujourd'hui encore représente le gouvernement chassé du pouvoir en 2021 par les talibans.

Le colonel Boïmakhmad Radjazoda, responsable du département des réfugiés au sein du ministère tadjik de l'Intérieur, assure néanmoins que son pays fait tout pour ces déplacés.

"Les réfugiés peuvent jouir de nombreux droits semblables aux citoyens tadjiks", assure-t-il à l'AFP.

"Ils ont accès à des soins médicaux, nous avons ouvert une école pour les Afghans et nous pouvons leur délivrer des vêtements, de la nourriture et des médicaments", ajoute-t-il.

Mais de nombreux réfugiés confient ne pas pouvoir se permettre les dix dollars mensuels requis pour que leurs enfants fréquentent l'école. Ils s'organisent donc entre eux pour les cours.

Si ces déplacés sont reconnaissants de l'accueil que le Tadjikistan leur a réservé, ce n'est pas ici que la plupart comptent refaire leurs vies.

Leur espoir: rejoindre le Canada, qui s'est engagé à accueillir 40.000 Afghans. Mais les délais sont longs.

"Nous avons fait les démarches pour aller au Canada, mais nous n'avons toujours pas de réponse", regrette Bibikhawa Zaki.

Dans l'attente d'un retour et faute de travail, la jeune femme s'efforce de tromper l'ennui. Elle se rend à ses trois entraînements hebdomadaires de football et lit, en anglais, pour entretenir son niveau.

La famille de Jawid Sharif, père de cinq enfants, survit comme elle peut grâce à l'argent de la vente de leur maison à Kaboul.

Sa fille Tamkin, footballeuse et peintre en herbe de 14 ans, rêve de poursuivre des études artistiques.

"Un jour, je serai une grande artiste", affirme-t-elle en montrant l'une de ses oeuvres, accrochée sur le mur de la cuisine: un portrait en chemise jaune d'Ahmad Zahir, un célèbre chanteur afghan.

Th.Frei--HHA