Laurent Nuñez succède à Didier Lallement à la tête de la préfecture de police de Paris
Changement d'ère à la préfecture de police de Paris: l'ancien secrétaire d'Etat Laurent Nuñez a été nommé mercredi en remplacement de Didier Lallement, cible des attaques de la gauche qui lui attribuait la responsabilité des violences policières.
La nomination du coordonnateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme à la place de M. Lallement, sur proposition du ministre de l'Intérieur, fait partie de celles qui sont décidées par le chef de l'Etat.
"C'est un homme ferme mais aussi plein de rondeur. C'est le meilleur choix", a commenté Gérald Darmanin dans un entretien accordé au Parisien.
Le ministre a également "rendu hommage" à Didier Lallement, bientôt 66 ans, qui "aura occupé les fonctions très exigeantes de préfet de police pendant plus de trois ans, dans une période marquée par de nombreuses crises".
En poste depuis 2019, M. Lallement, qui quittera ses fonctions dès jeudi, a dit sa "fierté du devoir accompli" dans un courrier aux 44.000 agents de la préfecture de police (PP), dont près de 28.000 policiers.
"Pendant trois ans, nous avons eu un vrai chef avec une vision claire, qui a su préserver l'unité de l'institution", a salué auprès de l'AFP un haut fonctionnaire de la PP.
Dans cette lettre dont l'AFP a pris connaissance, le préfet dit toutefois "conserver la blessure de l'échec du Stade de France" fin mai, lorsque la finale de la Ligue des champions avait été le théâtre de scènes de chaos autour de l'enceinte de Saint-Denis.
En guise d'au revoir, Didier Lallement, qui s'est toujours amusé d'être détesté, a fait "don de sa casquette d'uniforme au musée de la préfecture de police".
- Tâche immense -
Son départ n'est toutefois pas lié au fiasco du Stade de France: Didier Lallement avait annoncé plusieurs semaines auparavant son départ à ses troupes.
La tâche de son successeur, ex-secrétaire d'Etat auprès de Christophe Castaner, alors ministre de l'Intérieur, s'annonce immense.
A commencer par la préparation des Jeux olympiques de 2024 à Paris. Après le raté du Stade de France, il devra lever les doutes sur les capacités de la France à accueillir une grande manifestation populaire.
L'organisation de la cérémonie d'ouverture des JO, conçue comme une parade fluviale sur la Seine, relève déjà du casse-tête sécuritaire. De nombreuses voix s'élèvent déjà dans les rangs policiers pour s'en inquiéter.
Didier Lallement lui-même avait jugé l'opération déraisonnable. Mais elle est voulue par le président Emmanuel Macron et la maire de Paris Anne Hidalgo.
Le départ de M. Lallement, qui avait des relations très conflictuelles avec Mme Hidalgo, a été salué par le premier adjoint à la mairie, Emmanuel Grégoire. "Bienvenue au nouveau préfet de police de Paris, @NunezLaurent ! Nous nous réjouissons de travailler avec lui et toutes les équipes de la @prefpolice", a-t-il tweeté.
"Didier Lallement s'en va. Bon débarras. Nous n'oublions pas les Gilets jaunes éborgnés, les mains arrachées, les manifestants blessés. Ni les contrôles abusifs des habitants des quartiers populaires. Ni le retour de la BRAV-M", a tweeté la député insoumise Mathilde Panot.
- Terrain favorable -
L'avocat Arié Alimi, intervenu dans de nombreux dossiers liés aux violences policières, a rappelé à l'AFP "l'outrance et la violence assumée en terme de communication, une focalisation sur sa personne pour faire oeuvre d'épouvantail et détourner le regard de l'exécutif".
Laurent Nuñez arrive donc en terrain favorable, même si de nombreux dossiers difficiles restent à régler avec la mairie, du plan "crack" à l'accueil des migrants ou à la gestion des manifestations.
Sur ce dernier point, M. Nuñez est sur la même ligne que son prédécesseur, dont la vision musclée du maintien de l'ordre a suscité de multiples critiques, ont fait savoir plusieurs hauts responsables policiers.
Âgé de 58 ans, Laurent Nuñez a l'avantage de connaître parfaitement la préfecture pour avoir été directeur de cabinet du préfet de police Bernard Boucault entre 2012 et 2015. Il y conserve des soutiens et des amitiés solides.
Il a été également préfet de police des Bouches-du-Rhône de 2015 à 2017.
Avant d'être nommé en 2018 secrétaire d'Etat auprès de Christophe Castaner, il a été patron de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) pendant un peu plus d'un an.
Après avoir quitté la place Beauvau en juillet 2018, il a rejoint l'Elysée pour y coordonner la "task force" contre le terrorisme.
A la PP, il va régner sur "un Etat dans l'Etat", avec plus de 40.000 fonctionnaires, une police judiciaire prestigieuse et une direction du renseignement autonome, au grand dam de son ancienne "maison" la DGSI.
M.Huber--HHA