Ukraine: accord vendredi sur l'exportation des céréales ukrainiennes, poursuite des bombardements russes
La Russie, dont l'armée a à nouveau bombardé Kharkiv, la deuxième plus grande ville ukrainienne, y faisant trois morts, va signer vendredi avec l'Ukraine un accord sur les exportations de céréales très attendu par la communauté internationale face aux risques de famines dans le monde.
Le document aux termes duquel une sortie par la mer Noire du blé ukrainien bloqué par la guerre et un allégement des entraves au transport de grains et d'engrais russes deviendront possibles sera paraphé à Istanbul, a annoncé la Turquie jeudi, le jour où les livraisons de gaz russe à l'Europe ont partiellement repris.
"Nous saluons l'annonce de cet accord sur le principe, mais ce qui nous importe maintenant c'est (...) de permettre aux céréales ukrainiennes d'atteindre les marchés mondiaux", a commenté la diplomatie américaine.
"La délégation ukrainienne ne soutiendra que les solutions qui garantissent la sécurité des régions méridionales de l'Ukraine, une position forte des forces armées ukrainiennes en mer Noire et l'exportation sûre des produits agricoles ukrainiens", a également très prudemment réagi auprès de l'AFP le porte-parole du ministère ukrainien des Affaires étrangères Oleg Nikolenko.
- Nouveau bombardement meurtrier à Kharkiv -
Dans le même temps, un nouveau bombardement russe a fait jeudi trois morts et 23 blessés, dont quatre graves, à Kharkiv, une cité du nord-est de l'Ukraine pilonnée depuis des semaines, a annoncé le gouverneur régional Oleg Synegoubov. Déjà la veille, trois personnes y avaient été tuées, dont un adolescent près d'un d'arrêt de bus.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov avait quant à lui affirmé la veille que les objectifs de Moscou ne se limitaient plus uniquement à l'est de l'Ukraine, mais concernaient également d'"autres territoires" et pourraient encore s'étendre.
Parties à l'assaut de l'Ukraine le 24 février, les troupes russes étaient rapidement arrivées aux portes de la capitale Kiev, sans parvenir à la prendre. Dès la fin mars, la Russie avait dit vouloir se concentrer sur le Donbass, dans l'est, en partie contrôlé par des séparatistes prorusses depuis 2014.
Les soldats russes ont avancé ces dernières semaines dans ce bassin minier, faisant notamment sauter le double verrou de Severodonetsk et de Lyssytchansk, deux villes de la région de Lougansk, ce qui leur a dégagé la voie pour tenter de progresser vers les villes de Kramatorsk et de Sloviansk, plus à l'ouest dans la région de Donetsk.
Kiev a parallèlement affirmé jeudi que les Russes stockaient des armes lourdes et des munitions "à proximité immédiate" d'installations sensibles sur le site de la centrale nucléaire occupée depuis mars de Zaporijjia, la plus grande d'Europe, s'alarmant d'un risque d'explosion accidentelle et d'incendie.
Moscou a de son côté évoqué des raids de drones ukrainiens lundi, à "quelques dizaines de mètres de structures vitales pour la sécurité de la centrale", puis à nouveau mercredi.
- 15.000 soldats russes tués ? -
Human Rights Watch a accusé aussi bien les soldats russes qu'ukrainiens d'"inutilement" mettre en danger des civils en installant des troupes au coeur de zones habitées, comme un sous-sol d'école et un dispensaire.
La guerre en Ukraine doit cesser pour éviter le "précipice" d'un conflit "nucléaire", a pour sa part jugé dans un entretien exclusif avec l'AFP le président bélarusse, tout en considérant que c'était à Kiev et aux Occidentaux de céder au Kremlin.
Principal allié de Moscou, Alexandre Loukachenko a prêté le territoire de son pays à l'armée russe pour qu'elle puisse lancer son offensive sur l'Ukraine le 24 février.
Environ 15.000 militaires russes sont morts depuis le début de la guerre, ont par ailleurs estimé les agences de renseignement américaine et britannique.
"C'est à peu près" le même niveau de pertes que celui enregistré par les soldats soviétiques pendant les dix ans de leur intervention en Afghanistan, a noté Richard Moore, le chef du renseignement extérieur britannique (MI6).
- Du gaz russe... avec parcimonie -
Dernier épisode en date dans le bras de fer russo-occidental sur l'énergie, la Russie a remis en marche jeudi le gazoduc Nord Stream, qui relie directement les champs gaziers sibériens au nord de l'Allemagne, après un arrêt de dix jours pour des travaux d'entretien, selon Moscou.
Il ne fonctionne néanmoins qu'à 40% de sa capacité, comme avant la maintenance, a déploré l'opérateur allemand du réseau, Gascade.
L'Autriche et l'Italie ont aussi fait état d'une reprise des livraisons.
"Rien ne s'opposait techniquement à ce que Nord Stream revienne à une exploitation de plein régime après son entretien", s'est emporté le ministre allemand de l'Economie et du Climat Robert Habeck, pour qui "la Russie se révèle de plus en plus être un facteur d'incertitude dans le système énergétique".
Dans le contexte de la guerre en Ukraine, le président russe Vladimir Poutine utilise le gaz comme "une arme", avait martelé la veille la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
Des soupçons de "chantage" balayés d'un revers de la main jeudi par le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, pour qui "ce sont ces restrictions (imposées par les Occidentaux, ndlr) qui empêchent d'effectuer les réparations d'équipements, notamment des turbines dans les stations de compression".
L'Ukraine, dont l'économie s'est effondrée depuis le début de l'invasion russe, a quant à elle annoncé le même jour la dévaluation de 25% de sa monnaie nationale, la hryvnia, face au dollar.
"Une telle mesure renforcera la compétitivité des producteurs ukrainiens" et "soutiendra la stabilité de l'économie dans les conditions de guerre", a expliqué dans un communiqué la banque centrale.
A.Swartekop--HHA