RDC: deux personnes tuées par des Casques bleus à un poste-frontière dans l'est
Au moins deux personnes ont été tuées dimanche lorsque des Casques bleus ont ouvert le feu sur un poste frontalier avec l’Ouganda, dans l'est troublé de la République démocratique du Congo, où des manifestations anti-ONU ont secoué la région la semaine dernière.
Dans une vidéo de l'incident partagée sur les réseaux sociaux, on voit des hommes dont au moins un en tenue de policier et un autre de militaire congolais, s'avancer vers le convoi immobilisé de l'autre côté de la barrière fermée à Kasindi, dans le territoire de Beni, à la frontière avec l'Ouganda.
Après un échange verbal, on voit les présumés Casques bleus tirer des coups de feu, avant d'ouvrir la barrière et de franchir le poste.
"Des militaires de la Brigade d’Intervention de la force Monusco de retour de congé ont ouvert le feu au poste frontalier pour des raisons inexpliquées et forcé le passage. Cet incident grave a causé des pertes en vies humaines et des blessés graves", déplore la mission onusienne dans un communiqué sans fournir de bilan précis.
"Le bilan est de deux morts", a déclaré à l'AFP Joël Kitausa, un responsable de la société civile de Kasindi, qui a fait également état de 14 blessés. Plus tôt, Barthélemy Kambale Siva, délégué du gouverneur du Nord-Kivu à Kasindi, avait donné un bilan de huit blessés graves dont deux policiers du poste frontalier.
La cheffe de la Monusco, Bintou Keita, s'est dite "profondément choquée et consternée par ce grave incident", selon le communiqué de la mission.
"Face à ce comportement inqualifiable et irresponsable, les auteurs de la fusillade ont été identifiés et mis aux arrêts en attendant les conclusions de l’enquête qui a d’ores et déjà commencé en collaboration avec les autorités congolaises", précise la Monusco.
"Les contacts ont été également établis avec le pays d’origine de ces militaires pour qu’une procédure judiciaire soit initiée urgemment avec la participation des victimes et des témoins, afin que des sanctions exemplaires soient prises dans les meilleurs délais", ajoute la mission onusienne, sans mentionner la nationalité de ces Casques bleus.
Le gouvernement de la RDC "condamne et déplore vigoureusement cet incident malheureux dont le bilan provisoire fait état de deux compatriotes décédés et 15 autres blessés", dans un communiqué de son porte-parole Patrick Muyaya publié dans la soirée.
Conjointement avec la Monusco, les autorités ont "initié une enquête pour établir les responsabilités, connaître les motivations d’un tel forfait et obtenir des sanctions sévères à l’encontre des Casques bleus à la base de ce drame qui sont, du reste, déjà aux arrêts", dit-il.
- "Laisser la place" -
Kinshasa, qui a appelé la population congolaise "au calme", prévient que "les Casques bleus concernés ne pourront plus faire partie des contingents de la Monusco, en attendant l’aboutissement du plan de retrait de cette force onusienne de la RDC".
La semaine dernière, des manifestations meurtrières accompagnées de destructions et pillages ont eu lieu dans plusieurs villes de l'est de la RDC pour réclamer le départ des Nations unies.
A Goma, Butembo, Beni et d'autres localités, des manifestants avaient pris d'assaut les installations de la Monusco. Dix-neuf personnes, dont trois Casques bleus, ont été tuées dans ces manifestations violentes.
Les manifestants accusaient les Casques bleus d'inefficacité dans la lutte contre la centaine des groupes armés responsables du chaos dans lequel sont plongées les provinces de l'est du pays depuis près de 30 ans.
Une des plus importantes et des plus coûteuses missions de l'ONU au monde, la Monusco est présente en RDC depuis 1999. Elle compte actuellement plus 14.000 soldats de la paix, avec un budget annuel d'un milliard de dollars.
En visite en RDC, Jean Pierre Lacroix, chef du département de paix de l'ONU a indiqué samedi être venu pour "parler avec les autorités congolaises, examiner les moyens par lesquels nous pourrons à la fois éviter se reproduire ces incidents tragiques et surtout mieux travailler ensemble pour atteindre nos objectifs".
"Nous souhaitons que les conditions soient réunies, notamment le retour de l'autorité de l’État, pour que la Monusco puisse avoir terminé sa mission le plus vite possible et laisser la place à d'autres formes de soutien international", a-t-il dit.
O.Rodriguez--HHA