La police en alerte à Bagdad, manifestations rivales attendues
Les forces de sécurité étaient en état d'alerte lundi à Bagdad après des appels à manifester des rivaux politiques du puissant leader Moqtada Sadr dont les partisans occupent le Parlement, dans un contexte d'impasse politique totale.
Les adversaires de Moqtada Sadr, des partisans de la puissante alliance de factions chiites pro-Iran appelée Cadre de coordination, ont néanmoins souligné que le rassemblement "n'était pas dirigé contre un groupe en particulier", selon les appels relayés sur les réseaux sociaux.
La tension est montée d'un cran en Irak après le rejet par M. Sadr du candidat au poste de Premier ministre présenté par le Cadre de coordination qui regroupe le Hachd al-Chaabi, ex-paramilitaires intégrés aux forces régulières, et la formation de l'ex-Premier ministre Nouri al-Maliki, ennemi historique du leader chiite Sadr.
Maintenant c'est au tour de leurs adversaires de se mobiliser: après des messages circulant sur les réseaux sociaux annonçant un rassemblement lundi à 17H00 locales (14H00 GMT), les forces de l'ordre ont déployé à Bagdad un important dispositif de sécurité et plusieurs barrages de contrôle.
La manifestation doit se dérouler sur une avenue menant à la Zone verte, qui abrite institutions gouvernementales, ambassades occidentales et le siège du Parlement.
- "Gouvernement des corrompus" -
Mais les instructions données aux manifestants leur interdisent d'entrer dans la Zone verte. L'objectif affiché est de "défendre l'Etat et sa légitimité", et le rassemblement "n'est pas dirigé contre une personne ou un groupe en particulier", est-il écrit dans les messages.
Un responsable du parti de M. Maliki a confirmé les appels à manifester.
Les dirigeants du Cadre de coordination ont dans le même temps multiplié les appels au dialogue pour résoudre la crise.
Dans l'autre camp, un proche de M. Sadr a appelé des rassemblements à la même heure, à 17H00, dans les provinces d'Irak.
Au Parlement à Bagdad, quelques milliers de manifestants sadristes restent mobilisés, brandissant drapeaux et portraits de Moqtada Sadr, a constaté une correspondante de l'AFP.
Dansant dans le hall principal, ils scandent "Voici les soldats du fils du Sayyed", en allusion à Moqtada Sadr et son titre de descendant du prophète.
A l'entrée, des hommes fouillent les nouveaux venus tandis que plusieurs tentes ont poussé dans les jardins.
"Nous voulons éliminer le gouvernement des corrompus, nous ne voulons pas recycler les mêmes visages", a lancé Zaher Al-Atabi, un manifestant. "Depuis 2003 jusqu'à maintenant, ceux qui ont dirigé le pays n'ont rien fait pour développer des services publics, pas de système de santé, pas d'éducation!"
Qu'importe si des fidèles à Moqtada Sadr occupent également les plus hauts échelons dans les ministères, ses partisans le voient en figure d'opposition et héraut de la lutte contre la corruption.
- "Dérapages" -
Depuis les législatives d'octobre 2021 la paralysie politique est totale. Des mois de tractations entre les grands partis n'ont pas permis d'élire un nouveau président de la République ou un nouveau chef du gouvernement.
Célèbre pour ses volte-face, M. Sadr a démontré qu'il était encore capable de mobiliser les foules pour faire avancer ses pions.
Il cherche à faire pression sur ses adversaires alors qu'il leur avait laissé la tâche de former un gouvernement, faisant démissionner en juin ses 73 députés. Avant leur démission, ses élus représentaient le premier bloc au Parlement de 329 députés.
Dimanche, M. Sadr a appelé tous les Irakiens à se joindre à la contestation, y voyant "une opportunité extraordinaire pour un changement fondamental du système politique".
Le Cadre de coordination y a vu un appel à un "coup d'Etat" contre les institutions.
Lundi, interpellant les deux camps rivaux, Hadi al-Ameri, qui dirige une faction du Hachd, a réitéré son appel pour "un dialogue constructif".
Il a mis en garde contre "une atmosphère d'escalade médiatique, provoquée par des communiqués et des contre-communiqués appelant aux mobilisations des masses, qui peut déraper et mener à des violences".
E.Mariensen--HHA