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Les Douguine, prophètes ultranationalistes et médiatiques
Les Douguine, prophètes ultranationalistes et médiatiques / Photo: Kirill KUDRYAVTSEV - AFP

Les Douguine, prophètes ultranationalistes et médiatiques

Le philosophe ultranationaliste Alexandre Douguine et sa fille Daria Douguina, tuée samedi dans un attentat, partageaient la même idéologie et une exposition médiatique importante en Russie, même si leur proximité avec le Kremlin est contestée.

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Le président Vladimir Poutine a néanmoins adressé, lundi, ses condoléances personnelles après la mort de Maria Douguina, 29 ans, dénoncée par Moscou comme un coup des services secrets ukrainiens.

"Comme journaliste, scientifique, philosophe et correspondante de guerre, elle a servi le peuple et la patrie avec sincérité, illustrant par ses actes ce qu'être une patriote russe veut dire", a salué M. Poutine.

Le père de Daria, Alexandre Douguine, 60 ans, a émergé en Russie dans les années 1990, dans le chaos intellectuel ayant suivi l'effondrement du système communiste. Il s'allie alors, un temps, avec l'écrivain Edouard Limonov, promoteur d'un parti d'opposition "national-bolchévique".

Douguine se distingue ensuite comme un chantre du "néo-eurasisme", une doctrine anti-libérale qui affirme que Moscou doit libérer le monde des dérives occidentales en érigeant un empire allant de l'Europe à l'Asie.

Écumant les plateaux de télévision russes, reconnaissable à sa longue barbe qui lui donne des airs de prophète, Alexandre Douguine, également remarqué en Occident, se vante d'avoir une influence idéologique sur Vladimir Poutine.

"Je suis un partisan de Poutine, je transmets la volonté de la société conservatrice et de l'identité russe, je ne formule pas cela individuellement", affirmait-il, dans un excellent anglais, en 2017, lors d'une interview à la chaîne américaine CBS.

- Liens en Europe occidentale -

Mais, face à un système de pouvoir opaque, des observateurs doutent de ses liens réels avec le Kremlin. Vladimir Poutine ne s'est jamais affiché publiquement avec lui et a même critiqué par le passé les ultra-nationalistes, considérés comme trop dangereux en Russie, un pays multi-ethnique.

La proximité supposée de Douguine avec le Kremlin lui a néanmoins valu des représailles bien réelles: depuis l'annexion en 2014 de la Crimée, qu'il a soutenue bec et ongle, il est sanctionné par les Etats-Unis et l'Union européenne.

Et, ces dernières années, certaines de ses idées radicales, qu'il n'est pas le seul à promouvoir, semblent avoir réellement infusé au Kremlin, qui s'est lancé en Ukraine dans une offensive militaire dénoncée comme une tentative de rebâtir l'empire russe.

Suivant les traces de son père, sa fille Daria, née en 1992, avait elle-aussi commencé ces dernières années à se faire un nom dans les médias publics russes. Sous le pseudonyme de Daria Platonova, elle avait travaillé pour la chaîne Russia Today et le média conservateur "Tsargrad".

Et, comme son père, elle avait tissé des liens avec des personnalités d'extrême-droite en Europe occidentale. Ayant étudié à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France, elle avait notamment fréquenté des personnalités françaises proches de la patronne de l'extrême droite, Marine Le Pen.

Daria Douguina s'était également rendu en reportage dans les territoires séparatistes de l'est de l'Ukraine, en pleine offensive à grande échelle des troupes russes, que les Douguine ont soutenue en coeur. Et, comme son père, elle avait été sanctionnée, début mars, par les Etats-Unis.

Ils revenaient ensemble, mais dans des véhicules différents, d'un festival culturel conservateur dans la région de Moscou, quand Daria Douguina a été tuée dans l'explosion de sa voiture.

Dans sa dernière interview, enregistrée quelques heures avant sa mort, elle avait dénoncé le "racisme" des droits humains, l'homosexualité, et assuré que, grâce à l'attaque en Ukraine, "un dangereux totalitarisme occidental était arrivé à sa fin".

A.Baumann--HHA