Toute la nuit, les Britanniques se sont pressés pour des adieux poignants à la reine
Les Britanniques ont fait la queue toute la nuit de lundi à mardi pour se recueillir devant le cercueil d'Elizabeth II à Edimbourg avant son transfert à Londres, où se préparent des adieux grandioses à l'ultrapopulaire souveraine à la longévité record dans l'histoire du Royaume-Uni.
Pendant que l'avènement de Charles III se poursuit dans une Irlande du Nord où le Brexit a ravivé le spectre d'un passé sanglant, des milliers d'anonymes rendent une ultime visite à sa défunte mère, s'inclinant, faisant la révérence, se signant ou essuyant une larme devant le cercueil de chêne qui repose dans la cathédrale Saint-Gilles de la capitale écossaise.
Très tôt mardi matin, le temps d'attente était d'environ deux heures mais la queue devrait se rallonger dans la matinée, a prévenu le gouvernement écossais.
Placé sur une estrade et recouvert de l'étendard jaune, rouge et bleu marine de l'Ecosse, une couronne de fleurs blanches et la couronne en or massif de l'Ecosse posées au-dessus, le cercueil est resté accessible toute la nuit à la population, gardé par quatre archers royaux et protégé par un cordon qui tient le public à distance de plusieurs mètres.
Les enfants d'Elizabeth II dont la princesse Anne, première femme à participer à une telle veillée royale, se sont tenus tous les quatre dos au cercueil pendant une dizaine de minutes, avant de quitter la cathédrale sous les applaudissements de la foule.
La photo des enfants d'Elizabeth II autour de son cercueil fait la une de tous les quotidiens mardi. On y voit Charles en kilt, les yeux baissés. "La veillée du roi", titre le tabloïd le Sun. "La famille royale unie dans le chagrin", retient le Times. Pour le Daily Mail, "Le roi mène une nation dans le deuil".
- Hommage royal et anonyme -
Le corps d'Elizabeth II, qui a régné pendant 70 ans, avait jusqu'à lundi soir été tenu à l'écart du grand public: d'abord au château de Balmoral, dans le nord de l'Ecosse, où la monarque s'est éteinte jeudi à l'âge de 96 ans, puis au palais royal d'Holyroodhouse.
Figure populaire, roc de stabilité dans la tempête tantôt politique, sociale ou sanitaire pendant le Covid-19, la reine était une image rassurante pour des millions de Britanniques durant toutes ces décennies sur le trône.
"Elle était tout pour nous. Elle était notre reine, et c'est bien ça le royalisme. Une des choses que la reine nous a toujours apporté, c'est ce sentiment de sécurité", a commenté Marina Reid, 54 ans, interrogée par l'AFP à Belfast, en Irlande du Nord.
Lui succédant, Charles II a entamé une tournée dans les quatre nations constitutives du Royaume-Uni, d'abord avec le Parlement britannique de Londres, puis celui d'Edimbourg, avant Cardiff, au Pays de Galles, vendredi.
C'est à Belfast qu'il se rend mardi avec la reine consort Camilla pour rencontrer des responsables politiques et recevoir des condoléances dans un contexte de tensions communautaires renouvelées depuis le Brexit dans cette province endeuillée par trois décennies de violences jusqu'à l'accord de paix de 1998.
Tensions en Irlande du Nord, velléités indépendantistes en Ecosse, inflation galopante qui plombe le pouvoir d'achat, le nouveau roi de 73 ans, plus âgé que tous les souverains britanniques à leur accession au trône, s'installe dans ses fonctions dans un moment critique. Le pays, en proie à une grave crise sociale et politique, a une nouvelle Première ministre depuis quelques jours à peine.
Le roi devra probablement affronter les revendications de certains de ses 14 autres royaumes (comprenant notamment l'Australie, les Bahamas, le Canada, la Nouvelle-Zélande ou encore la Jamaïque) qui pourraient réclamer un nouveau régime, portés par des velléités républicaines à la faveur de ce changement de souverain.
"Je crois que c'est la direction que prendra la Nouvelle-Zélande à un moment donné, je crois qu'il est probable que cela se produise de mon vivant, mais je ne vois pas cela dans le court terme ou quelque chose qui soit à l'ordre du jour dans un avenir proche", a déclaré la Première ministre de Nouvelle-Zélande Jacinda Ardern.
- Dernière étape avant Londres -
Elizabeth II a commencé dimanche son dernier voyage.
La dépouille de la reine a ainsi atteint la troisième étape de son parcours. Après avoir quitté Balmoral, un château qu'Elizabeth II chérissait, puis Edimbourg, le cercueil embarquera mardi après-midi à bord d'un avion royal pour Londres, escorté par la princesse Anne.
Il sera accueilli à son arrivée par le roi Charles et d'autres membres de la famille royale.
Il passera la nuit au palais de Buckingham.
Débutera alors le deuxième volet de présentation au public, londonien cette fois, qui devrait voir défiler des centaines de milliers de personnes pendant un peu moins de cinq jours 24 heures sur 24.
Deux jours avant l'ouverture au public, les premiers se sont installés lundi en tête d'une file qui pourrait atteindre huit kilomètres, a constaté un journaliste de l'AFP.
Les funérailles nationales de la reine auront lieu lundi en présence de quelque 500 dignitaires étrangers et de nombreuses têtes couronnées.
Ch.Brandes--HHA