Cuba approuve le mariage gay et un code de la famille progressiste
Les Cubains ont approuvé à plus de 66% par référendum un nouveau Code de la famille qui légalise le mariage homosexuel, la filiation élargie et la gestation pour autrui, faisant de l'île le pays le plus progressiste en la matière en Amérique latine.
Le texte était largement soutenu par le gouvernement communiste et le vote en faveur du "oui" a fait l'objet d'une intense campagne officielle au cours des dernières semaines, dans la rue, à la télévision et sur les réseaux sociaux.
Ce denier a précisé que la tendance en faveur de la nouvelle loi était désormais "irréversible". "Le code des familles a été approuvé par le peuple", a déclaré la présidente de l'autorité électorale, Alina Balseiro.
"Le +oui+ a gagné. Justice a été rendue (...) Il s'agit de régler une dette envers plusieurs générations de Cubains, dont les projets familiaux attendent cette loi depuis des années", a réagi le président Miguel Diaz-Canel.
"A partir d'aujourd'hui, nous serons une meilleure nation", a-t-il ajouté.
Quelque 8,4 millions de Cubains ont été appelés dimanche à répondre par oui ou par non à la question: "Êtes-vous d'accord avec le code des familles ?"
La participation s'est établie à 74,01%, selon l'autorité électorale qui devait encore valider les résultats dans une trentaine de circonscriptions.
Ce taux est en recul par rapport au précédent référendum. En 2019 la nouvelle Constitution avait été approuvée par près de 87% des votants, pour une participation de 90,15%.
"Le +oui+ l'a emporté par un score inférieur comparativement à d'autres élections, mais avec une marge réellement importante", a souligné Arturo Lopez-Levy, politologue cubain à l'université Holy Names, en Californie.
Le nouveau code, qui remplace dès lundi l'ancien datant de 1975, est particulièrement progressiste. Il définit le mariage comme l'union de "deux personnes", légalisant ainsi le mariage homosexuel, et autorise l'adoption homoparentale.
Il renforce les droits des enfants, des personnes âgées et des handicapés, et introduit la possibilité de reconnaître légalement plusieurs pères et mères, outre les parents biologiques. Il autorise la gestation pour autrui sans fins lucratives.
Le politologue Rafael Hernandez, interrogé par l'AFP, a confirmé qu'avec le nouveau texte Cuba se trouvait "à l'avant garde" en Amérique latine.
"Nous avons gagné!! Cuba a son Code des familles. Il s'agit maintenant de le faire respecter", a réagi sur Twitter le journaliste et militant gay Maykel Gonzalez Vivero.
- "Occasion presque unique" -
Plusieurs de ces sujets restent sensibles à Cuba, dans une société encore empreinte de machisme et dont le gouvernement communiste a ostracisé les homosexuels dans les années 1960-1970, avant de faire amende honorable. Les évêques catholiques ont aussi rejeté le texte.
Le scrutin est également intervenu alors que le pays de 11,2 millions d'habitants traverse un profonde crise économique et fait face à une vague d'émigration record.
Il y a plus d'un an, en juillet 2021, des manifestations historiques aux cris de "Nous avons faim" et "Liberté" ont également secoué l'île.
Le président Diaz-Canel a lui-même reconnu dimanche "que pour des questions aussi complexes, où il existe une diversité de critères" personnels, et dans un contexte économique difficile, "des gens peuvent avoir un vote sanction".
A la suite des manifestations de juillet 2021, plus de 1.300 personnes ont été arrêtées selon l'ONG de défense des droits humains Cubalex.
Parmi elles, 790 font l'objet de poursuites et environ 500 ont d'ores et déjà été condamnées à des peines pouvant aller jusqu'à 25 ans de prison.
Les opposants au gouvernement étaient aussi divisés face à la nouvelle loi, certains appuyant le texte tout en se désolidarisant du pouvoir, d'autres appelant à voter contre ou à s'abstenir.
Il ne faut pas "interpréter ce vote comme un soutien au régime", a estimé auprès de l'AFP le sociologue et dissident Manuel Cuesta Morua. "De nombreux militants de la communauté LGBT veulent des changements profonds et ont vu (...) une occasion presque unique de faire avancer certains droits".
Ch.Tremblay--HHA