Bayeux: 66 noms de plus au mémorial des reporters morts en action
Le secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF), Christophe Deloire, a inauguré jeudi une nouvelle stèle portant 66 nouveaux noms de journalistes morts ces deux dernières années dans l'exercice de leurs fonctions au mémorial des Reporters de Bayeux.
Parmi les victimes de l'année 2021-2022, figurent Shireen Abu Akleh (Palestine), Maks Levin (Ukraine), et Frédéric Leclerc-Imhoff (France), dont les proches, présents à la cérémonie, ont pris la parole dans le cadre du Prix Bayeux des correspondants de guerre 2022.
L'émotion a envahi le sous-bois accueillant le mémorial lors de prises de parole successives de la nièce de Shireen, Lina, célébrant "sa tante, sa meilleure amie, son inspiration", qui souhaitait "justice, vérité et paix pour le monde", et de Sylviane, la mère de Frédéric Leclerc-Imhoff, selon laquelle il "n'a pas donné sa vie pour l'information, on la lui a prise".
Après la mort de son fils, Sylviane avait envoyé un message à Christophe Deloire, déclarant que "sa courte vie aura eu un sens", comme celle de Maks Levin. Ce dernier "voulait faire une photo qui mettrait fin à cette guerre (l'invasion de l'Ukraine par la Russie NDLR)", selon Markiian Lyseiko, l'un de ses amis, lui aussi photographe de guerre.
RSF a publié en juin une enquête menée en Ukraine accusant des soldats russes d'avoir tué, et peut-être torturé, le photoreporter ukrainien Maks Levin en mars.
Frédéric Leclerc-Imhoff était un journaliste pigiste français de 32 ans, également tué en Ukraine, dans le Donbass au printemps.
Star d'Al Jazeera, la journaliste américano-palestinienne Shireen Abu Akleh avait elle été tuée par balle le 11 mai alors qu'elle couvrait une opération militaire israélienne dans un camp palestinien des territoires occupés.
Interrogé par l'AFP, le secrétaire général de RSF a rappelé que 400 journalistes sont en détention aujourd'hui dans le monde, et 50 à 70 sont assassinés tous les ans du fait de l'exercice de leur profession, dont 31 depuis le 1er janvier.
"Nous sommes dans un moment d'explosion de la communication et les pouvoirs, quelqu'ils soient, n'ont plus d'intérêt à passer par le filtre des journalistes. Certains estiment même que leur intérêt est de les éliminer" a analysé M. Deloire. Il a cependant relevé que, "sur la décennie, il y a une baisse des journalistes tués. Les rédactions sont beaucoup plus précautionneuses aujourd'hui, peut-être parce que les conflits en Irak et en Syrie ont été très meurtriers".
Le Prix Bayeux, qui se tient du 3 au 9 octobre, met à l'honneur des reportages de guerre du monde entier. La remise des prix aura lieu samedi en fin de journée.
U.Smith--HHA