Ukraine: Macron appelle Poutine à "revenir" à la négociation, promet des systèmes anti-aériens à Kiev
Emmanuel Macron a exhorté mercredi soir le président russe Vladimir Poutine à "revenir autour de la table des discussions" et promis la livraison de systèmes de défense anti-aériens à l'Ukraine, en proie à de nouveaux bombardements russes massifs.
"Aujourd'hui, d'abord, Vladimir Poutine doit cesser cette guerre, respecter l'intégrité territoriale de l'Ukraine et revenir autour de la table des discussions", a affirmé le président français sur France 2, reprochant à son homologue d'avoir fait le "choix" d'"installer" l'Europe "dans la guerre" avec ses frappes de missiles des derniers jours et la mobilisation pour renforcer son armée.
Celui qui, malgré les critiques y compris ukrainiennes, n'a jamais rompu le dialogue avec le maître du Kremlin depuis l'invasion russe de l'Ukraine le 24 février, a assuré qu'il continuerait de lui parler "à chaque fois que cela sera nécessaire".
Le président Macron a redit qu'il reviendrait in fine aux Ukrainiens de décider quand les conditions de la négociation seront réunies et que le but affiché était clair: un retour aux "frontières de 1991", avant l'annexion de la Crimée en 2014 et celle de quatre régions fin septembre par la Russie.
"La question est de savoir si ces buts de guerre ne seront obtenus que militairement", s'est-t-il interrogé. "Moi, je crois qu'à un moment donné, ce sera de l'intérêt de l'Ukraine et de la Russie de revenir autour de la table et de négocier", a-t-il insisté.
"La stabilité de notre continent, c’est notre affaire à tous (...) Nous aurons des rôles de garants à jouer", a-t-il dit, tout en concédant que ces négociations n'interviendraient "pas dans les prochaines semaines" et qu'il fallait se préparer à "passer l'hiver dans ce contexte de guerre".
D'ici là, la France va continuer à aider militairement l'Ukraine en lui livrant des "radars, des systèmes et des missiles anti-aériens" face aux bombardements et aux attaques de drones russes, outre des canons Caesar.
Il a également adressé une mise en garde au président du Belarus, Alexandre Loukachenko, l'un des principaux alliés des Russes, en assurant qu'il aurait des "problèmes" dans son pays s'il s'engage plus encore dans le conflit.
- "Éviter toute escalade" -
Interrogé par la journaliste Caroline Roux, dont il a inauguré la nouvelle émission politique "L'Événement" sur France 2, Emmanuel Macron a estimé qu'il fallait "éviter toute escalade du conflit" pour qu'il ne s'étende pas à un pays voisin de l'Ukraine et pour empêcher le recours par Moscou à des armes chimiques ou nucléaires.
Mais le chef de l'État, qui a promis de "dire la vérité" aux Français sur les implications du conflit, a préféré botter en touche sur la menace nucléaire agitée par le président russe, rappelant seulement que la France était également un pays "doté" de la bombe atomique et qu'il croyait en la "dissuasion". "Moins on en parle", plus elle est crédible, a-t-il glissé en substance.
Avec cette heure d'interview à un moment de grande écoute, en grande partie consacrée au conflit qui bouleverse le monde, le président de la République s'est prêté à un exercice inédit: pour une fois les sujets internationaux ont eu la vedette. Emmanuel Macron a longuement expliqué les enjeux de la guerre à grand renfort de pédagogie, cartes et graphiques à l'appui.
Ces enjeux sont d'autant plus lourds que la guerre entre dans une nouvelle phase, avec des frappes russes massives depuis lundi sur le territoire ukrainien et des menaces directes du Kremlin sur les Européens qui soutiennent Kiev.
- Carburant -
Interrogé sur la vague de protestations vivement réprimées qui secoue l'Iran depuis près d'un mois, il a dit son "admiration" pour les "femmes" et les "jeunes" mobilisées depuis la mort d'une jeune femme trois jours après son arrestation par la police des mœurs à Téhéran. "Nous nous tenons aux côtés" des manifestants, a-t-il dit.
Faisant un détour par la politique intérieure, le chef de l’État a prévu un retour à la normale "dans le courant" de la semaine prochaine sur le front des carburants, alors que les Français sont confrontés à des difficultés croissantes d'approvisionnement en raison des grèves dans les raffineries. Égratignant au passage la CGT, qui doit "permettre au pays de fonctionner".
Le président doit par ailleurs revenir dans deux semaines sur le même plateau de télévision, le 26 octobre, pour un second volet de l'émission consacré cette fois aux enjeux de politique nationale.
A travers cette double interview, Emmanuel Macron veut occuper le terrain dans un contexte politique chahuté, avec la perte de la majorité absolue à l'Assemblée nationale, des oppositions tonitruantes et un automne social potentiellement agité.
R.Weber--HHA