Budget: Borne accuse les oppositions de "blocage", le 49.3 imminent
Sur le front du budget, l'un des dossiers épineux pour le gouvernement, Elisabeth Borne a accusé mardi les oppositions de "blocage", préparant le terrain au 49.3 qui a toutes les chances d'être dégainé mercredi devant l'Assemblée.
"Pour trouver un compromis, il faut être deux: les présidents de groupe (d'opposition) ont dit dès le début qu'ils ne voteraient pas le projet de loi de finances. Le blocage ne vient pas de nous", a lancé la Première ministre lors de la réunion du groupe des députés Renaissance mardi matin, selon des propos rapportés.
L'Assemblée nationale, où les macronistes sont privés de majorité absolue, débat bon an mal an depuis une semaine du projet de budget de l'Etat pour 2023 et les défaites se sont enchaînées pour le gouvernement.
Le recours à l'article 49.3 de la Constitution, pour faire adopter le texte sans vote sauf motion de censure, a été autorisé dès mercredi dernier en Conseil des ministres.
Il sera déclenché "probablement" mercredi, dernier jour d'examen de la partie recettes, en vertu "du délai constitutionnel" prévu, a indiqué le porte-parole du gouvernement Olivier Véran sur France 2.
"Maintenant, on verra comment les débats évoluent dans la journée" de mardi, a-t-il prévenu, alors que la séance s'est éternisée lundi soir sur la proposition de la gauche et du RN de rétablir l'ancienne version de l'impôt de solidarité sur la fortune, finalement rejetée.
Un sujet de taille est à venir, celui de la taxation des "superprofits", mais les oppositions pointent des "manœuvres dilatoires" du camp présidentiel pour ne pas avoir à en discuter et risquer d'être mis en minorité.
"Je sais que ce texte peut être ingrat dans son examen: merci à vous d'avoir tenu la ligne et d'avoir fait bloc", a lancé Mme Borne aux députés macronistes, dont les nerfs sont à vif.
"Mais il y a aussi eu des propositions intéressantes dont on tiendra compte dans le texte final", sur lequel elle engagera sa responsabilité, a enchaîné la cheffe du gouvernement qui a réuni encore lundi les cadres de la majorité pour sélectionner les amendements à retenir. Les oppositions, hors RN et LFI, ont parallèlement été contactées.
Crédit d'impôt renforcé pour la garde d'enfants, impôts réduits pour les plus petites entreprises, taxation du carburant des jets privés: le gouvernement a dit oui à des mesures avancées y compris par les oppositions.
- "Sujet démocratique" -
Mais c'est niet à l'amendement MoDem de taxation des "superdividendes" des grandes entreprises, pourtant approuvé par l'Assemblée la semaine dernière. "Il n'y aura pas de prime à l'échappée solitaire" dans la majorité, a recadré mardi Mme Borne.
Le président des députés MoDem, Jean-Paul Mattei, n'en démord pas: "On compte bien apporter notre pierre au débat" et "jouer notre rôle de parlementaires à fond".
Les oppositions sont aussi vent debout contre le fait de revenir sur les votes acquis. "On ne peut pas (en) faire fi, c'est un vrai sujet démocratique", s'est récrié le communiste Nicolas Sansu devant la presse. Et si le budget était suffisamment amendé dans le bon sens, "nous pourrions reconsidérer notre position" et pourquoi pas voter en faveur du budget, fait valoir la socialiste Christine Pirès-Beaune.
Certains plaident pour allonger les débats au-delà de mercredi, les parlementaires ne pouvant venir à bout dans ce délai des 2.000 amendements restant à examiner.
La Première ministre a en tête les critiques à venir. Dans la lignée de la "nouvelle méthode" de recherche de compromis, "il faut donner sa chance au débat, d'autant plus que les Français n'aiment pas beaucoup le 49.3", a-t-elle reconnu mardi.
Mais "on ne peut pas dire que le 49.3 soit un passage en force" car, juste après, "une motion de censure donne lieu à un débat et à un vote, c'est un vrai moment démocratique", a tenté de déminer la locataire de Matignon.
Elle sera confrontée à des motions de l'alliance de gauche Nupes et du RN qui n'ont guère de chance d'être adoptées.
Pour Aurore Bergé, la patronne des députés Renaissance, l'affaire est entendue: "On a fait la démonstration du débat. Nous devons aller plus vite sur les prochains textes", a-t-elle pressé devant ses troupes.
H.Brunner--HHA