Moscou évacue les civils de Kherson: une "déportation", dit un élu ukrainien
La Russie a commencé mercredi à évacuer la population de Kherson, une ville du sud de l'Ukraine où son armée est de son aveu même confrontée à une situation "très difficile", une opération qui s'apparente selon un responsable ukrainien à une "déportation" de civils visant à créer la "panique".
Parallèlement, les bombardements russes se sont poursuivis sur l'ensemble du territoire ukrainien, dans le nord, y compris à Kiev, mais aussi dans l'ouest, une zone en général plus épargnée par les combats.
Depuis lundi, Kiev a été attaquée à plusieurs reprises par des drones kamikazes russe qui ont notamment visé des infrastructures énergétiques et fait au moins cinq morts.
Plus au nord, un autre aéronef sans pilote, de fabrication iranienne, a explosé à Tcherniguiv et deux missiles russes ont été interceptés dans ses environs, ont affirmé les Ukrainiens, qui ont fait état de trois blessés hospitalisés.
Dans la partie occidentale, "l'ennemi a frappé la centrale à charbon de Bourchtynska", ce qui a déclenché un incendie qui a par la suite pu être maîtrisé, ont déclaré les autorités régionales d'Ivano-Frankivsk.
La région de Vinnytsia, également dans l'ouest, a elle aussi été la cible de missiles russes, selon son gouverneur.
- "Déportation" -
Dans le sud de l'Ukraine, l'administration russe de la région de Kherson a assuré mercredi que les évacuations de civils avaient débuté. Elle prévoie d'en déplacer "50.000 à 60.000" en quelques jours sur l'autre rive du Dniepr.
La ville de Kherson, occupée depuis le printemps, va de même être évacuée, face à l'avancée des troupes ukrainiennes, a dit le chef des autorités municipales prorusses Vladimir Saldo, promettant que les soldats russes allaient résister "jusqu'à la mort".
Le général Sergueï Sourovikine, récemment nommé chef des opérations russes en Ukraine, avait reconnu mardi que la situation y était "très difficile".
Un député local, Serguiï Khlan, a toutefois estimé mercredi que cette "évacuation annoncée" équivalait à une "déportation" de la population, "comme à l'époque soviétique". "Son but est de créer une sorte de panique à Kherson et une image (pour alimenter) la propagande" russe, a-t-il dénoncé.
Pour lui, les Russes utilisent les évacuations de civils comme un "prétexte" pour justifier "leur retrait de Kherson et plus généralement de la rive droite" du Dniepr.
- "Loi martiale" -
Egalement dans la partie méridionale de l'Ukraine, une cinquantaine d'employés de la centrale nucléaire de Zaporijjia, aux main des Russes depuis mars, sont "toujours prisonniers", a déploré l'opérateur ukrainien Energoatom, tandis que, depuis le début de la guerre, d'autres ont été "torturés", voire "tués".
Dans une autre cité conquise -après avoir été dévastée- par les troupes russes, Marioupol, l'administration a fait démonter mercredi un monument aux victimes de la famine des années 1930 en Ukraine, que Kiev qualifie de génocide organisé par Staline, mais que Moscou minimise.
Au total, "environ cinq millions d'habitants" des territoires ukrainiens annexés en septembre par Moscou sont actuellement en Russie, où ils ont "trouve refuge", a de son côté affirmé le secrétaire du Conseil de sécurité russe, Nikolaï Patrouchev.
Il s'agit des régions de Lougansk, Donetsk, Kherson et Zaporijjia dans lesquelles le président russe Vladimir Poutine a ordonné mercredi l'instauration de la loi martiale -une mesure "nulle et non avenue", a réagi la diplomatie ukrainienne-, tout en évoquant par ailleurs la mise en place d'un régime d'alerte renforcé à Moscou.
L'armée russe, qui a envahi l'Ukraine le 24 février, est sur la défensive sur l'essentiel du front en Ukraine, reculant depuis septembre aussi bien dans le nord que l'est et le sud. Le seul tronçon où elle avance encore est situé près de la ville de Bakhmout (est), qu'elle tente de prendre depuis l'été.
A l'approche de l'hiver, elle bombarde actuellement de très nombreuses infrastructures énergétiques dans toute l'Ukraine.
Face à cette situation, "nous travaillons à la création de points d'alimentation mobiles en électricité pour les infrastructures critiques des villes et des villages", a expliqué mercredi le président ukrainien Volodymyr Zelensky, à l'occasion d'une "réunion stratégique".
- L'ONU se penche sur les drones iraniens -
Au plan international, le Conseil de sécurité de l'ONU devait se réunir à huis clos mercredi à partir de 15H00 GMT à New York à propos du recours à des drones conçus par l'Iran dans la guerre en Ukraine, à la demande des Occidentaux.
L'Union européenne avait auparavant annoncé avoir rassemblé des "preuves" démontrant l'origine iranienne des aéronefs sans pilote russes qui ont attaqué le territoire ukrainien et préparer des sanctions contre Téhéran.
L'Iran a pour sa part nié à plusieurs reprises ces derniers jours fournir des armes et en particulier des drones à la Russie pour ce conflit.
Israël a quant à lui affirmé mercredi qu'il ne livrerait pas d'armes à Kiev. "Notre politique à l'égard de l'Ukraine ne changera pas. Nous continuerons à soutenir l'Occident et à nous tenir à ses côtés, nous ne fournirons pas de systèmes d'armement à l'Ukraine", a dit son ministre de la Défense Benny Gantz.
Dans un tout autre registre, le président Zelensky s'est félicité de la remise du prestigieux prix Sakharov du Parlement européen aux Ukrainiens, saluant son peuple qui se bat pour "la liberté et la démocratie".
Ch.Brandes--HHA