A Kiev, la "débrouille" d'habitants privés d'eau et d'électricité
Ils sont plus d'une centaine à faire la queue. Dans un parc de Kiev, des Ukrainiens se pressaient lundi pour remplir bouteilles et bombonnes à une fontaine, victimes de coupures d'eau après des frappes russes le matin.
Emmitouflée dans une parka marron, Tamara vient juste d'arriver avec son mari pour prendre place dans la file.
"Ce matin, il y a eu de grosses explosions. Je ne sais pas s'il y a eu une frappe ou pas, mais il n'y a plus eu d'électricité dans notre maison à partir de 6 heures du matin. Ensuite, l'eau a commencé à se raréfier. Et maintenant, il n'y en a plus du tout", explique la jeune femme de 33 ans, qui ne souhaite pas donner son nom.
"On fait la queue pour récupérer de l'eau potable", ajoute la mère de deux enfants âgés de 9 et 11 ans.
Dans la matinée, la Russie a lancé une nouvelle attaque massive contre les infrastructures dans plusieurs régions d'Ukraine, privant d'eau jusqu'à 80% des habitants de la capitale, Kiev, et laissant "des centaines de localités" sans électricité.
Des précédentes frappes sur le système énergétique de la capitale les 10 et 17 octobre avaient conduit l'opérateur ukrainien privé DTEK à imposer des coupures de courant de 4 heures, chaque jour, dans des quartiers de la ville.
En fin de journée lundi, le maire de Kiev, Vitali Klitschko, a annoncé que "270.000 appartements" étaient encore sans électricité et "40% des consommateurs" restaient toujours privés d'eau.
Tamara confirme qu'elle a "des pannes (de courant) depuis deux semaines maintenant. Nous nous débrouillons", dit-elle.
"Nous surmonterons tout cela et nous retrouverons la lumière. Vous savez, parfois les enfants aiment même s'asseoir avec des bougies, ils savent que tout cela est temporaire, l'essentiel est d'y croire", lance la jeune femme.
- "Rien de grave" -
Dans la queue, Vitali, un ingénieur de 25 ans, veut aussi relativiser les coupures d'eau ou d'électricité: "Ce n'est pas très agréable mais je pense que tout ira bien, ce n'est rien de grave".
A la fontaine du parc, les deux robinets coulent sans interruption. Chacun remplit dans le calme plusieurs bouteilles ou bonbonnes d'eau. Certains sont même venus avec des sceaux. Les plus âgés ont apporté des chariots à roulettes pour porter plus facilement les récipients.
A une vingtaine de kilomètres de là, au nord de Kiev, c'est un site énergétique qui a été touché par plusieurs missiles, tôt dans la matinée.
Postés sur une carrefour, une quinzaine de militaires et policiers interdisaient l'accès à la route menant au site.
Mila Riabova, une habitante de la ville contigüe, son mari et leur fille de 9 ans, ont été "réveillés par de puissantes explosions".
"Je n'ai pas entendu de sirène (d'alerte), j'ai juste reçu un message d'alarme de raid aérien sur mon téléphone", explique cette traductrice âgée de 39 ans.
"On s'apprêtait à emmener notre fille à l'école. Mais nous ne l'avons pas emmenée parce qu'il n'y a plus de lumière là-bas", comme dans leur appartement, raconte-t-elle.
Est-ce qu'elle a peur de ces bombardements ? "Je n'ai peur de rien", répond-elle. "Il y a encore des gens dans les abris (anti-bombe), mais pas nous".
Toutefois, alors que l'hiver approche, la perspective de devoir vivre peut-être sans électricité ni chauffage l'inquiète.
"Cela peut être difficile à gérer, surtout avec une enfant en bas âge", dit-elle, ajoutant envisager peut-être de partir à l'étranger.
F.Schneider--HHA