Attentat d'Istanbul: 22 arrestations, les autorités désignent les Kurdes du PKK
Le ministre de l'Intérieur turc Suleyman Soylu a accusé le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) d'être responsable de l'attentat qui a fait au moins six morts dimanche dans l'artère commerçante d'Istiklal, à Istanbul, et annoncé l'arrestation d'une vingtaine de suspects, dont celui qui a déposé la bombe.
"La personne qui a déposé la bombe a été arrêtée. (...) D'après nos conclusions, l'organisation terroriste PKK est responsable" de l'attentat, a affirmé M. Soylu dans une déclaration nocturne, relayée par l'agence officielle Anadolu et les télévisions locales.
Il a ensuite confirmé l'arrestation de vingt-et-un autres suspects sans préciser où les interpellations avaient eu lieu.
L'attentat, qui n'a pas été revendiqué, a fait six morts et 81 blessés dont la moitié sont toujours hospitalisés lundi. Parmi les victimes, toutes des citoyens turcs, figurent une fille de 9 ans tuée avec son père et une adolescente de 15 ans, morte avec sa mère.
Le ministre a aussi accusé les forces kurdes des YPG, les Unités de défense du peuple, qui contrôlent la majeure partie du nord-est de la Syrie, d'être derrière l'attentat. "Nous estimons que l'ordre de l'attentat a été donné de Kobané", a-t-il ajouté.
La ville de Kobané est restée célèbre pour la bataille qui, en 2015, a permis aux forces kurdes de repousser le groupe Etat islamique. Elle est contrôlée par les Forces démocratiques syriennes (FDS) dont les YPG - alliées au PKK - sont une composante majeure.
Pour Ankara, tous ces mouvements sont "terroristes".
Fermé immédiatement après l'attentat, l'accès à la rue a été de nouveau autorisé lundi matin, ont constaté les journalistes de l'AFP.
Tous les bancs ont été retirés et un tapis rouge couvre l'emplacement où s'est produite l'explosion, sur lequel les passants viennent déposer des oeillets, rouges eux aussi.
Parmi eux, Mads Reiflin Johannessen, un touriste danois qui se trouvait dimanche à 300 m de l'attentat quand il s'est produit, a-t-il confié.
M. Soylu n'a pas précisé les conditions dans lesquelles la "personne" suspectée a été arrêtée, ni s'il s'agit d'une "femme" comme l'avaient affirmé dimanche soir le président Recep Tayyip Erdogan et son vice-président Fuat Oktay.
Le ministre de la Justice, Bekir Bozdag, avait, plus tôt, rapporté qu'une "femme s'est assise sur un banc pendant 40 à 45 minutes et, une ou deux minutes après, il y a eu une explosion".
Le président Erdogan avait le premier dénoncé un "vil attentat", juste avant de s'envoler pour l'Indonésie et le sommet du G20: "Les premières observations laissent subodorer un attentat terroriste", avait affirmé le chef de l'Etat, ajoutant qu'"une femme y serait impliquée et que les auteurs seraient "punis".
- PKK et Otan -
Le PKK, considéré comme une organisation terroriste par Ankara mais aussi par ses alliés occidentaux dont les Etats-Unis et l'Union européenne, est en lutte armée contre le gouvernement turc depuis le milieu des années 80. Il a été souvent été rendu responsable par le passé d'attentats sanglants sur le sol turc.
En décembre 2016, un double attentat près du stade de foot de Besiktas, à Istanbul - 47 morts dont 39 policiers et 160 blessés - avait été revendiqué par les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), groupe radical kurde proche du PKK.
Le PKK est par ailleurs au coeur d'un bras de fer entre la Suède et la Turquie, qui bloque depuis mai l'entrée de Stockholm dans l'Otan en l'accusant de mansuétude envers le PKK.
Ankara a réclamé l'extradition de plusieurs de ses membres dans un mémorandum d'accord signé en juin avec la Suède et la Finlande, autre pays nordique désireux de rejoindre l'Alliance atlantique.
Après la visite à Ankara du Premier ministre suédois Ulf Kristersson, la semaine dernière, le Parlement suédois s'apprête à voter pour changer la constitution afin de durcir sa législation anti-terroriste.
Le PKK est également régulièrement visé par des opérations militaires turques contre ses bases dans le nord de l'Irak et de la Syrie.
Le mois dernier, de nombreuses accusations relayées par l'opposition et des observateurs turcs, mais démenties par les autorités, ont évoqué l'emploi d'armes chimiques par l'armée turque contre des combattants du PKK qui ont publié une liste de 17 noms, accompagnés de photos de personnes présentées comme des "martyrs" tués par des gaz toxiques.
E.Gerber--HHA