Le chef des droits de l'homme à l'ONU veut se rendre en Iran, appels occidentaux à cesser la répression
Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a affirmé jeudi être sans réponse de l'Iran à sa demande de visite, au moment où le Conseil des droits de l'homme doit décider s'il veut lancer une enquête internationale sur les exactions dont est accusé Téhéran.
Les 47 Etats membres de la plus haute instance onusienne en matière de droits humains débattent en urgence de la "détérioration de la situation des droits de l'homme" à l'initiative de l'Allemagne et de l'Islande.
"L'usage inutile et disproportionné de la force doit cesser. Les méthodes anciennes et la mentalité de forteresse assiégée de ceux qui détiennent le pouvoir ne fonctionnent tout simplement pas", a affirmé M. Türk, qualifiant de "récit habituel de la tyrannie" l'attitude de ceux qui "cherchent à délégitimer" les manifestants, les représentants de la société civile et les journalistes.
Il a également assuré par la suite aux journalistes que sa demande de visite en Iran restait lettre morte.
De nombreux diplomates occidentaux ont dénoncé la répression des manifestations en Iran qui, depuis plus de deux mois, a fait au moins 416 morts, dont 51 enfants, selon l'ONG Iran Human Rights (IHR), basée en Norvège.
Cette vague de contestation - née de revendications pour les femmes après la mort de Mahsa Amini arrêtée pour avoir mal porté le voile islamique et qui se sont transformées en contestation du pouvoir - est sans précédent depuis la Révolution islamique de 1979.
"Le peuple iranien réclame quelque chose de si simple, quelque chose que la plupart d'entre nous considèrent comme allant de soi: la possibilité de parler et d'être entendu", a affirmé l'ambassadrice américaine Michèle Taylor, des membres de sa délégation brandissant des photos et des noms des victimes.
Selon le Rapporteur spécial de l'ONU sur l'Iran, plus de 15.000 personnes ont été arrêtées. La justice iranienne a déjà prononcé six condamnations à mort en lien avec les manifestations.
- Faire la lumière -
Le Conseil doit décider s'il nomme une équipe d'enquêteurs de haut niveau pour faire la lumière sur toutes les violations des droits humains liées à la répression des manifestations.
"Cette résolution, si elle est adoptée, compte beaucoup. Nous ne savons pas si (...) elle peut sauver des vies demain. Mais ce que nous savons avec certitude, c'est que cela signifiera la justice, justice pour le peuple", a déclaré la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, aux journalistes à Genève.
Selon le projet de résolution présenté par l'Allemagne et l'Islande, cette mission d'enquête internationale indépendante -qui n'a guère de chance de pouvoir se rendre en Iran- devra collecter les preuves des violations et les conserver de manière à pouvoir servir à d'éventuelles futures poursuites.
"+Femme, Vie, Liberté+. C'est avec ce slogan si simple, et si fort, que les Iraniennes et les Iraniens rappellent, depuis plus de deux mois, les valeurs qu'ils défendent", a déclaré la représentante française, Emmanuelle Lachaussée.
- "Dialogue et coopération" -
Téhéran pour sa part se démène pour tenter de trouver assez d'alliés afin de faire échouer la résolution, tandis que la ministre allemande des Affaires étrangères a encouragé les pays qui en général votent avec l'Iran à avoir le courage de s'abstenir. Selon plusieurs sources diplomatiques, la résolution devrait être adoptée.
La représentante iranienne dépêchée par Téhéran, Khadijeh Karimi, a accusé les pays occidentaux de "manquer de crédibilité morale" pour faire la leçon à l'Iran, en dénonçant les sanctions américaines et européennes.
Sans surprise, la Chine, la Russie, le Venezuela et Cuba ont apporté leur soutien à l'Iran, l'ambassadeur chinois Chen Xu défendant comme à son habitude "le dialogue et la coopération (...) pour promouvoir et protéger les droits de l'homme".
Le Pakistan a également souligné l'importance d'obtenir le consentement du pays concerné pour lancer des enquêtes, mais le Brésil, autre pays leader parmi ceux en développement, a annoncé qu'il allait s'abstenir pendant le vote.
Une résistance croissante - sous la houlette de la Russie, de la Chine ou encore de l'Iran - se bâtit dans l'enceinte du Conseil contre les efforts souvent initiés par les démocraties occidentales de faire condamner des Etats individuels pour les violations des droits humains.
Ces pays ont subi une cuisante défaite le mois dernier, quand ils ont tenté de mettre à l'agenda du Conseil un débat sur la répression menée par Pékin dans la région du Xinjiang.
M.Huber--HHA